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Jeux Viens à Vous Florent Toscano

Les Jeux OPLA, vous en avez déjà manger? 
Le coupable c'est lui!

Florent sous ses airs sérieux de scientifique écologique est un pince sans rire qui sait vous surprendre et vous déstabiliser par ses réponses  parfois surprenantes, parfois très complètes, mais qui se rappelle de vous avoir rencontré il y a déjà plusieurs années. 

 

Avec Florent nous parlons de ses débuts, d'Yves Renou, de  sa ligne éditoriale spécifique et de ses choix difficiles mais qu'il ne regrette jamais, d'écologie, de ses aventures en festival, de sa relation avec les auteurs, du prix de certains choix, d'Alexandre Droit et de Nicolas Bourgoin ses amis lyonnais, de la CAL et de Matthieu d'Epenoux comme toujours! 

 

 

1) Florent Toscano bonjour, aurais-tu la gentillesse de te présenter? 

 

Oui

 

Dois-je passer à la prochaine question  ?  :p
 

Comme tu veux, mais je peux répondre en vrai, hein, si tu ne me le demandes pas  !

 

Alors je ne te le demande pas ^^ 

Je vais commencer tout au début, à ma naissance, mais juste parce que c’est rigolo quand on est un peu dans le monde du jeu… Après je ferai un saut à plus loin, hein, rassures -toi, j’emmerde déjà pas mal tout le monde avec mes petites histoires personnelles que je mets dans mes jeux…

Bref, voilà, du coup je suis né à Cannes  ! C’est rigolo, hein  ? Non  ? Un peu, quand même… J’y fais comme tous mes copains ludistes un pèlerinage chaque hiver, genre vers fin février…

Ensuite j’ai grandi et évolué en Corrèze (c’est pas tant que ça un détail, ça va dépendre de quoi on va causer ensuite) où j’ai fondé avec deux copains l’association Chamboultou, qui existe toujours, mais que je ne préside plus depuis trois-quatre ans.
On faisait plein d’animations ludiques pour la ville (Ussel, la ville), on tenait un webzine ludique (à une époque où il y en avait très peu en France, et où on ne parlait pas encore de blog), on a ouvert un bar à jeux associatif et on a lancé un festival en août, qui existe toujours et qui est le plus joli festival du monde  ! Donc baigné dans le jeu depuis un moment. Et pendant toutes ces activités ludiques que je pratiquais pour mon petit plaisir et celui des Corréziens, j’avais en parallèle de vraies activités de la vraie vie qui faisaient que je n’étais physiquement qu’assez rarement sur place, parce que...

Florent et Juan Rodriguez à Ussel dans un tournoi de Tic tac boum

 

Je suis parti de ma Corrèze après le bac pour faire l’étudiant à Limoges où j’ai passé un DEUG de Biologie, puis une Licence puis une Maîtrise de Biologie et Physiologie Animale. Après je suis parti à Lyon faire un DEA (l’ancêtre du Master) Métabolisme-Endocrinologie-Nutrition. Toujours à Lyon j’ai enchaîné sur un Doctorat que j’ai soutenu en 2007. Après quoi j’ai fait cinq années de recherche, toujours à Lyon, au CRCL (Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon). En parallèle de tout ça, alors que mon activité chambouliste diminuait, j’ai créé avec ma compagne Johanna Poncet la maison d’édition Jeux Opla pour publier notre premier jeu, Pom Pom. Puis en 2012 un petit caprice m’a fait pencher pour m’occuper de ça à plein temps, ce que je continue à faire aujourd’hui… Voilà voilà le curriculum dans les grandes lignes…

 

"On ne passe qu’une fois ici"


 

2) Tu as une ligne éditoriale particulière, pas unique, mais avec une vraie démarche écologique, voire naturaliste.
Un choix qui semble dans l’air du temps, mais qui dans la réalité ne semble pas si simple qu’il n’y parait vu que tu es l’un des rares (avec Bioviva notamment) dans le monde ludique à l’opérer.
As-tu l’impression de faire le même métier que d’autres maisons d’éditions ou bien tes choix changent-ils totalement la démarche  d’éditeur?

Alors d’abord la ligne éditoriale est particulière de par les thèmes développés et la démarche de réalisation totale, et j’y reviendrai, pour expliquer en quoi il me semble qu’elle est justement unique. Mais sans doute suis-je le plus mal placé pour en juger. Je vais donc vite-fait (le «  vite-fait  » c’est pour vous rassurer mais en vrai je suis pas sûr que ce sera si vite que ça, rien que cette parenthèse a dû vous bouffer une bonne dizaine de secondes) vous expliquer en quoi elle consiste, dans un premier temps

 

Et pour comprendre tout ça, revenons aux origines, puisque c’est là que tout a commencé et que les fondations sur lesquelles nous nous reposons désormais ont été pensées puis conservées. Il y a maintenant une dizaine d’années, nous nous sommes rapprochés de jeunes gens merveilleux qui créaient une association, à Lyon, du nom de Croc’éthic. L’idée ressemblait à une AMAP, avec quelques aménagements différents. L’idée globale est de proposer aux consommateurs des fruits et légumes de saison issus de producteurs à moins de 80 km de Lyon. Un abonnement sur six mois est requis, permettant aux producteurs de la visibilité pour anticiper les récoltes nécessaires. Et évidemment tous les paysans (c’est pas un gros mot, ils préfèrent, même, c’est vachement mieux adapté) participants sont des gens responsables, qui font attention à ce qu’ils font, et travaillent proprement

 

Tous ne sont pas forcément bio, ce label n’étant pas une finalité. On s’était pas mal investis dans les débuts de cette association, Johanna (ma co-auteur du jeu et partenaire de vie jusque fraîchement ) fut même un temps Secrétaire du Bureau, me semble-t-il. Et j’avais donc cogité à un petit jeu qui parlerait de tout ça, mais sans être pédagogique car j’ai une idée toute négative de ces jeux «  éducatifs  ». Bref, ainsi est né un proto de Pom Pom, petit jeu familial qui a comme trame de fond la saisonnalité de production des fruits et légumes, les récoltes équilibrées et équitables tout au long de l’année, les circuits-courts de distribution… Nous avons eu le coup de main agricole des paysans de Croc’ pour le choix des 48 fruits et légumes du jeu, ainsi que des calamités. Un copain, Sphyrna, qui touchait un peu du pinceau, nous a fait tous les dessins. Et Johanna a rédigé un livret avec plein d’infos sur tous les fruits et légumes du jeu, ce livret accompagnera au final le jeu.

Et le jeu a tourné, longtemps, beaucoup, et les retours nous ont beaucoup motivé à en faire quelque chose, mais quelque chose qui nous corresponde et qui réponde à nos attentes. Alors pourquoi pas l’éditer  ? On montre le jeu à Yves Renou, le boss de Paille Editions, que j’adorais, et il avait beaucoup aimé, et  :

« -Vous voulez en faire quoi  ?

-On pensait peut-être l’auto-éditer…

-Ben oui, faîtes-le, faîtes-vous plaisir, vous savez, on ne passe qu’une fois, ici  ! Si vous l’éditez, je vous le distribue.

-Ha, ok, cool.  »

Je me souviens bien de ce «  on ne passe qu’une fois ici  », et m’en sers encore souvent (tout le temps)… Bref, c’est ainsi que ça a commencé, avec plein d’enthousiasme et d’excitation  ! Et au final assez en dilettante puisque nous bossions tous deux avec des tafs très prenant dans le temps et l’esprit. J’ai cherché des fabricants en France, car c’était un prérequis indispensable. Et qui pouvaient nous proposer des services propres. On voulait que l’ensemble soit complètement cohérent et pertinent, du thème au process de fabrication.

 

  Et c’est ainsi qu’est née la forme de ce qui deviendra notre gamme Nature, pour laquelle je suis allé encore plus loin dans la démarche par la suite. Et toujours de plus en plus de partenariats importants, des livrets accompagnant les jeux toujours plus riches… Et des jeux qui sont avant tout des jeux, avec des thèmes immersifs puisque tous les éléments du jeu ont été choisis avec des experts, systématiquement. Des ornithologues et équipes scientifiques et pédagogiques de la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) pour Migrato, des naturalistes et écologues pour Pollen, et carrément les équipes des films pour les adaptations des films de Luc Jacquet Il était une Forêt, La Glace et le Ciel et le prochain L’Empereur.

 

Deux autres gammes ont ensuite complété ces jeux, avec la même volonté de cohérence mais des points de départ différents.

La collection Hop (Hop la bille, Hop la puce et le récent Hop le j’ton) farfouille dans mon enfance, puisque je m’attache à adapter des jeux auxquels je jouais durant mon enfance corrézienne, avec un décorum propre à mon histoire familiale et un tryptique qui constitue cela quand on met les boites côte-à-côte, le tout sur fond de vrai hommage amoureux à mes grands-parents. Là, ça me touche tout particulièrement mais pour d’autres raisons…

Et la collection qu’on appelle BD avec Lincoln et Le Bois des Couadsous (et le prochain Apocalypse au Zoo) scénarise ludiquement des univers BD, avec des partenariats toujours funs  ! Ben là encore ça me touche beaucoup, parce qu’on s’amuse beaucoup avec cette collection  !

Florent explique Lincoln

 

Bref, tout ça pour raconter l’implication et l’unité que je m’échine à mettre dans nos petits jeux, et surtout, pour tous, le sens que je veux absolument qu’il y ait dedans. Serge, Mon directeur de labo, un bonhomme génial qui m’a énormément appris et ouvert les yeux, nous aiguillait pour que nos actes, quels qu’ils soient, fassent et donnent du sens. Dans notre travail, ça allait de soi, mais au-delà, dans notre vie en général. Et il m’est donc crucial de faire du sens dans la façon de faire des jeux et que le joueur le ressente et s’en trouve bien.

 

Donc, je pense pour tout cela que la démarche est unique. Je ne sais pas en revanche si c’est dans l’air du temps. Enfin, si, je sais que le côté écolo l’est, mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne chose commercialement, pour un jeu. Le côté Nature, écolo, se trimbale souvent une image qui nuit à la cause, à base volontairement exagérée de papier mâché, couleurs pastel, graines et lin. Je n’ai rien contre tout ça (je suis comme le maître d’armes, je mange des graines, et comme Bohorte, je porte du lin), mais le public non sensibilisé est souvent craintif de tout ça, ce que je comprends, et du coup le message se perd. Je n’aime pas que quand on fait les choses avec une arrière-idée de sensibilisation, on les destine de par leur forme uniquement à des gens qui le sont déjà, sensibilisés. C’est un peu bécher dans l’eau et pêcher sur terre. Donc en effet, c’est compliqué. D’un point de vue marketing surtout

 

Ha, et Bioviva… On ne fait pas du tout les mêmes choses. Le seul point commun est dans la fabrication des jeux. Ensuite les jeux sont extrêmement différents. Les joueurs se retrouvent dans les mécaniques de nos jeux, voir les joueurs plus drus avec des jeux comme La Glace et le Ciel ou Migrato. Les jeux Bioviva sont mécaniquement plus hyper familiaux et très grands publics, en témoignent leurs bests-sellers Défis Nature.

 

Et si l’immense majorité des éditeurs n’ont pas cette démarche de fabrication, c’est pour les coûts. Notre monde nous a habitué à ce que l’on fasse ce qui est faisable sans se préoccuper de la façon et des conséquences. Donc, globalement, on fait. Je suis bien placé pour le savoir, je fais partie comme nous tous de ce monde et le flingue exactement comme nous tous. Je prends ma bagnole (même si je fais gaffe), j’ai un smartphone (le pire des trucs pour l’environnement) dans ma poche et je mange de la viande (l’élevage pour la viande est l’amie du smartphone dans la lutte contre l’environnement)… Je le sais mais le fais, parce que je suis un connard d’humain. Initier, même comme nous le faisons, la production de tant de jeux, n’a pas de sens véritable. Je discute vachement avec beaucoup d’éditeurs, et je sais très bien que la plupart aimeraient aussi fabriquer comme nous.

Florent au salon des produits made in france

 

Mais c’est impossible parce que «  dans le jeu il y a ça, ça, et ça, et on ne peut pas le produire comme ça…  ». Moi, dans ce cas, je ne fais pas. Et je ne pointe pas du doigt les autres, on fonctionne juste différemment. Le côté parfois moralisateur des gens militants peut aussi me faire peur, car l’effet est souvent l’inverse. Donc on fait différemment, c’est tout, et si je peux en inspirer d’autres sans accuser personne au départ, j’en serai ravi  !

J’ai un gros cas de conscience car pour Bok (co-signé avec Alexandre Droit et Nicolas Bourgoin), il y a des chances que les sous-bocks soient fabriqués en Belgique. C’est à 300 km de Paris, et les jeux seront vendus en Belgique, donc environnementalement et économiquement, c’est pas déconnant. Mais malgré tout ça me travaille  ! Il y a peu, un copain éditeur m’a dit «  à chaque fois que je lance une production en Asie, j’ai l’impression de me faire violer  ». Moi je ne peux faire ces choses qu’en étant consentant…

 

Dans les livrets qui accompagnent les jeux, on explique de plus en plus tout ça, parce que c’est important pour moi, et j’espère transmettre ainsi un peu de ce qui fait sens pour moi…

Donc je fais exactement le même métier que les autres éditeurs, mais différemment. Je ne crois pas que j’aimerais faire exactement ce que tout le monde fait. Et le côté «  dernier des hussards  » comme m’a récemment et affectueusement appelé Mathieu d’Eppenoux, ne me déplait pas, au contraire  !

 

"J’ai refusé plusieurs contrats "

 

3) Tu parles de tes paradoxes écologiques, de manière franche et directe. Nous en avons d’ailleurs tous.
Qu’est ce qui te motive à accentuer tes efforts sur le jeu et moins sur d’autres matériels  ?
J’ai l’impression que parfois que les gens en triant simplement leurs déchets ont le sentiment de ne plus polluer, de supprimer les dégâts qu’ils créent par l’essence, l’utilisation de produits ménagers, l’importation de produits par la voie maritime, l’un des facteurs les plus polluants.
Crois-tu que la véritable révolution écologique arrivera quand nous prendrons réellement conscience des dégâts que nous provoquons et que nous assumerons pleinement notre responsabilité individuelle  ?

 

Tu as raison, on en a tous des paradoxes. Je sais aussi que c’est justement quand un individu est très impliqué qu’on remarque ses paradoxes aussi futiles et anodins soient-ils, et c’est finalement très rassurant. Si tu me pointes du doigt parce que j’expose certaines zones en contradictions avec ma démarche, c’est justement parce que ce léger côté transgressif est notable et donc la marque de cette démarche  ! Mais néanmoins ça me travaille beaucoup. D’autant que j’ai conscience que c’est de mon fait, de ma négligence, de ma nonchalance, de ma flemme… Et je me dis que moi, avec ma conscience et ma connaissance sur l’état des lieux et les conséquences de nos actes minimes, je fais mal, j’agis mal, alors comment peut-on faire bien, mieux, quand on ne sait pas  ? Pire, quand on s’en cogne  ? Bref…

Il y a une chose tout à fait curieuse qui est l’équilibre entre ce que l’on fait pour notre conscience (et/ou pour que mon voisin le voit) et ce que l’on fait parce qu’on sait que c’est important, que c’est ainsi qu’il faut que ce soit fait, que c’est logique, naturel. En effet, je pense qu’on peut s’alléger la conscience en triant ses déchets mais moins se questionner pour changer de smartphone sans vergogne chaque année. Alors que c’est le pire truc du monde  ! 

 

Ça me rappelle ces photos qui circulent sur le net, avec un connard occidental qui pose fièrement devant la viande fraîchement dézinguée d’un animal bientôt disparu, le fusil fièrement sur l’épaule. Et on est tous d’une même voix pour le conspuer, depuis notre clavier, le traitant, avec raison, de pire ordure. Mais chacun de nous, a-t-on conscience de toutes les conséquences de plein de nos actes qui nous paraissent anodins et sans effets délétères, parce que pas immédiats, pas là ou pas directement palpables  ? Pour chaque smartphone fabriqué, on arrache des dizaines de mètres-cubes à la terre, on… Non, ok, j’arrête avec les smartphones, ils ont déjà bien ramassés, là… Mais quand même  !

La façade est une chose dont on peut se contenter, comme un label qui ne veut pas toujours dire quelque chose, et la réalité en est une autre. Tiens, une petite anecdote de pas plus tard qu’il y a trois jours  : les manchots de L’Empereur sont fabriqués par la tournerie Carron, à Nancuise, dans le Jura. Le hêtre provient des forêts durablement gérées de Lons-le-Saunier, à une vingtaine de kilomètres.
Des entrepreneurs forestiers bucheronnent, débardent et transportent ce bois à la scierie Vuitton, à une dizaine de kilomètres, qui le conditionne pour l’envoyer à la tournerie. Ce bois est certifié PEFC. C’est parfait, de la forêt à la tournerie, tout est hyper local et fait proprement.
Je suis allé voir tout ça lundi et fus ravi que les manchots de notre jeu soient faits de la sorte. Et en discutant avec Hervé, le boss de la tournerie, il me dit  : «  on ne travaille plus avec un gros client car il veut absolument une labellisation FSC, alors pour avoir du bois FSC, on doit le faire venir d’Allemagne, et du coup ne plus faire travailler les entrepreneurs de la région, ni français.
Et ça nous coûte beaucoup plus cher de faire venir ce bois, et on génère un impact carbone forcément plus important avec le transport  ». Mais pourquoi  ? Qu’est-ce qu’on s’en fout du label machin-truc si il est au final délétère à la cause initiale  ? Bref, j’ai trouvé ça stupide. Enervant, même. Et je suis très content de mes Manchots et m’en tartine qu’ils soient FSC ou PEFC, je sais exactement d’où ils viennent et comment ils ont été fabriqués  ! 

 

Mais pour du bois qui vient de très loin, je crois quand même que FSC est plus sûr… Ces labellisations ne sont pas la panacée et ne sont même finalement que du moins pire. Une discussion avec Francis Hallé (le célébrissime botaniste qui m’avait bien épaulé dans le développement d’Il était une forêt) m’avait bien fait déchanter à ce niveau…

 

Alors je n’accentue pas mes efforts particulièrement sur le jeu,  mais sachant qu’absolument rien ne vient de la part des gouvernements, des pouvoirs publics, que cet espoir de la Cop21 s’est évaporé comme un pet de blatte, seule la société civile peut s’impliquer, et ce sont les civils qui ont entre les mains les entreprises, soit en les dirigeant, soit en consommant leurs productions, et donc là on peut finalement pas mal maîtriser les choses. Ainsi j’aime l’idée qu’à relativement grande échelle (en même temps on ne produit pas des jeux qui se vendent à des millions d’exemplaires…) on agit assez proprement et surtout localement.
Et surtout pas ce satané transport maritime, qui, comme tu le dis, est une des causes majeures de réchauffement climatique. Je cite souvent cette vérité qui est que les vingt plus gros tankers du monde (parmi les dizaines de milliers qui naviguent en continu de par les océans et mers du monde), engendrent autant de pollution que l’ensemble du parc automobile mondial en circulation  !
Alors quand on me dit «  oui, mais les dix palettes de ma prod’ de jeux dans le container, qu’elles y soient ou pas, ça changera pas que le bateau circulera…  » Oui, sauf que si on résonne tous ainsi, en effet. Mais si d’autres refusent ça, comme moi, en quantité grandissante, les choses changeraient. On a notre maîtrise entre nos mains. Alors au-delà de l’effet direct, je mise aussi sur l’inspiration que ça peut engendrer… Ça me rassure. Et ça, c’est majeur  !

 

Et cette démarche, j’y tiens, même pour l’étranger. C’est-à-dire que je suis ravi que mes jeux existent en Asie et partout dans le monde, mais je ne veux pas qu’ils voyagent par tanker. Et je veux qu’un jeu vendu quelque part profite à l’économie de ce quelque part.
Donc outre la périphérie française, on ne fonctionne qu’en licence. Et ça génère plein de refus de ma part de signatures de contrats quand on ne se met pas d’accord, à savoir une production locale et éco-friendly.
J’ai refusé plusieurs contrats

En 2016, ça m’a valu des «  C’est beau… C’est con mais c’est beau  !  ». Ca m’a même valu le sobriquet de fucking hero  ! Et ben sachez, mes amis, qu’en plus d’être inhabituel de voir «  sobriquet  » et «  funcking hero  » dans une même phrase, c’est bon pour l’environnement et c’est très mauvais pour la trésorerie  ! Mais c’est sans prix pour moi, sinon je ne serai pas du tout tranquille… Alors là je raconte toutes ces conneries parce que tu m’en parles, mais sans doute est-ce avant tout pour moi, parce que sinon je le vivrais vraiment mal  !

                     Le savoir est une arme, Florent est bien armé

 

Et cette révolution dont tu parles arrivera uniquement quand on nous y obligera. Parce qu’on n’est pas prêts. On ne peut pas s’empêcher de voyager, de grailler ce qu’on veut, d’acheter tous ces trucs. On est comme ça. On nous a appris à l’être, et on entretient ça. La révolution environnementale (putain, on cause de tout ça pendant une interview ludique… Hé, gardez en tête que je fais des jeux, hein, c’est quand même le cœur du propos  !) n’arrivera que quand on nous la soumettra de force, et comme nos pouvoirs publics ne sont pas prêts à réagir, et à nous soumettre ça, trop occupés qu’ils sont à se soumettre à la loi de la tune, et à nous en faire bouffer. Donc ça ne peut venir que de nous

 

Côtoyer quotidiennement des structures très impliquées, militantes, engagées, intelligentes, des scientifiques, intelligents, permet de savoir. Et quand on sait, l’enthousiasme est obligatoire, mais vain, car on connait l’issue. Le positivisme, l’espérance et la beauté avec lesquelles vont nous en parler des Luc Jacquet, son ONG Wild-Touch, des Nicolas Hulot, ne doit pas nous faire occulter la réalité que nous décrit un Claude Lorius (lisez Voyage dans l’anthropocène) ou un Paul Jorion (lisez Le dernier qui s’en va éteint la lumière). Mais bon, comme disait ce grand scientifique de ces dernières décennies, «  c’est au pied du mur qu’on voit le mieux le mur  » (je ne pensais pas pouvoir citer Bigard dans ce genre de discours…)  !

 

On revient au jeu, dis, parce que toi, oui, toi qui est arrivé à ce point de l’interview et qui pleure, regarde dans tes placards et si tu as certains de nos jeux, ouvre le livret et regarde toutes ces infos dont on le garnit… J’espère que ça te sera profitable et que ça te touchera et te sensibilisera. Et toi, oui, toi, surtout, si t’en as rien à carrer de nos arbres et de nos oiseaux, alors contente-toi de jouer et ce sera très bien, on ne te fera jamais la leçon. Ou alors j’aimerais bien que ça ne se voit pas trop…

Ha, et là, on le voit bien, non, le mur  ?..
 

 

 

4) Revenons au jeu alors.
Tu expliquais dans une interview donné à Ludovox que chacun de tes jeux sortait avec un partenaire.
Peux-tu nous expliquer l’intérêt de ces partenariats  ?
Est-ce une volonté de ta part pour communiquer  ? Un besoin économique afin de garder ta façon de travailler  ?
Est-ce toi qui prends contact après avoir le jeu en main ou bien à l’inverse reçois tu des propositions  ?

 

Ha c’est juste fun  ! Déjà tous ne sortent pas avec un partenaire. Le Bois des Couadsous par exemple. Mais c’est vrai que j’aime beaucoup ça. Je détesterais que dans le développement du jeu on n’implique pas très intimement d’autres entités que l’auteur, l’illustrateur et l’éditeur.Et surtout qu’elles soient extérieurs au milieu du jeu. On a besoin des autres. Alors les partenariats peuvent avoir la forme d’une licence, avec Bonne Pioche Cinéma et Disney Nature pour L’Empereur et Il était une Forêt, avec Akiléos pour Apocalypse, avec Paquet pour Lincoln, Wild-Touch pour La Glace et le Ciel… Afin d’utiliser la marque du film, de la bd… Ça peut être simplement pour impliquer des experts dans un domaine, afin de donner un crédit aux propos, aux paramètres scientifiques et naturalistes des jeux, comme Arthropologia pour Pollen, la LPO pour Migrato, La Salamandre pour ces deux jeux… Et c’est toujours sympa car ça nous permet de rencontrer des gens complètement extérieurs au monde du jeu et de mélanger ces éléments. Tout le monde en sort avec quelque chose de gagné  !


Au tout début, après Pom Pom, quand je développais Migrato, j’avais bêtement comme idée de chercher des partenaires qui financeraient une partie du jeu contre une com’ pour leur structure dans le jeu. Ok, j’étais naïf, mais cette recherche m’a permis d’entrer en contact avec plein d’assos, d’ONGs, et discuter, de rencontrer des gens et… Ben de comprendre et d’avoir envie que les partenariats soient naturellement des échanges de bons procédés, sans sous derrière, pour bénéficier à l’ensemble des structures impliquées et à la cohérence du jeu.

 

Je vais raconter l’histoire telle qu’elle s’est déroulée pour Il était une forêt et ce qu’elle a entraîné  :
En février 2013, sur la page Facebook du Parc des Oiseaux de Villars-les-Dombes, je découvre que Luc Jacquet sera cette année le parrain du Parc, qui a comme thème Natures Tropicales, à l’occasion de la sortie de son prochain film Il était une forêt en octobre… Pour vous situer, Luc Jacquet, c’est le gars qui a fait Le renard et l’enfant,  et avant ça La Marche de l’Empereur, et qui est revenu d’Hollywood avec un Oscar pour ça en 2003  !

 

 

Ha… Intéressant… Je regarde un peu et trouve des infos sur ce projet, notamment que… Francis Hallé, un botaniste que j’avais un peu lu de ci de là, était à l’origine de ce projet et serait le héros du film, où il nous raconterait l’histoire d’une forêt tropicale primaire… Francis Hallé, vous le connaissez, c’est ce scientifique qui avait mené les expéditions du radeau des cimes dans les années 1990, pour étudier la canopée…
Bref, là, ça m’avait bien excité, donc sans trop savoir pourquoi ni dans quelle direction, j’envoie un mail à Bonne Pioche, la production du film. Laurence, la productrice exécutive, me rappelle dans la journée. On se rencontre à Paris dans leurs bureaux quelques semaines plus tard, avec également le producteur Yves Darondeaux.
On s’entend bien, donc c’est ok, si j’ai un jeu qui tient la route, on a la licence  !

Alors à ce moment je découvre tout ça, le milieu tentaculaire du cinéma… Je planche sur le jeu, fais de la biblio, (mon vrai boulot d’avant fait que je suis très coutumier de cette activité), puis en quelques semaines ponds une maquette qui sera presque la mécanique finale du jeu, et ainsi l’histoire s’est faite. On a fait plein d’animations avec le jeu, des séances de ciné-jeux, des échanges avec le public, des évènements avec Wild-Touch (l’ONG de Luc Jacquet)…
 

Et on s’est hyper bien entendus parce qu’on fait finalement la même chose mais avec des supports différents  : le cinéma et le jeu. On s’est tous bien entendus, avec la prod’ Bonne Pioche, avec la distribution Disneynature, avec Wild-Touch… Et c’est donc finalement très naturellement que nous avons adapté le film suivant La Glace et le Ciel, cette fois co-produit par Wild-Touch et Eskwad et distribué par Pathé, puis maintenant L’Empereur, de nouveau avec Bonne Pioche et Disneynature.Ce suivi entre une équipe de cinéma et une gamme de jeux est je pense originale et unique. De la vraie fidélité entre nous !

Tout ça pour dire que multiplier les échanges avec des gens font qu’on tombe toujours sur ceux avec qui on aura naturellement des choses à faire, pour gagner encore en pertinence et en cohérence, pour faire encore plus… De sens  !

Alors je ne parle ici que des partenariats Nature, mais dans le milieu de la bd avec Lincoln ou le prochain Apocalypse, c’est tout aussi cohérent et fun  !

 

 

"Je pense vraiment que nous, nous verrons des choses extrêmement moches avant de disparaître. Et eux, ben ils les vivront."

 

 

5) Nous parlons nature depuis le début de l'entretien, et je me rends compte que je n'ai pas emmené mes enfants en promenade depuis bientôt une semaine à cause du pic de pollution.
Je dois t'avouer que je n'ai jamais vraiment fait attention à l'environnement jusqu'ici. 
Je suis en train de me demander comment vont vivre mes enfants au quotidien dans le futur, vont-ils pouvoir vivre normalement? 
Et leurs enfants? 
Notre génération est-elle selon toi irresponsable? 
Qu'envisages-tu pour ta belle Corrèze et tes enfants si tu en as? 

Le truc c’est ça, exactement. Tu ne fais pas attention à l’environnement. On ne devrait même pas avoir à y faire attention puisqu’on en fait partie, mais on ne le sait plus. On se voit nous, les humains, puis tout le reste de la biodiversité comme à part. Alors que nous faisons partie de cette biodiversité  !

Une nouvelle anecdote, ok  ? Quand j’ai préparé Il était une forêt avec Francis Hallé, que l’on choisissait les essences et les animaux visibles dans le jeu, et qu’il me détaillait leurs organisations, il m’a dit  : «  Florent, ce serait merveilleux si on pouvait mettre les Humains sur les cartes, au sol. C’est un de mes regrets, que dans le film, on ne voit pas l’Homme.  »

J’étais au début étonné, son message étant que l’Homme détruisait justement tout, paramètre que nous faisions déjà apparaître, mécaniquement et visuellement, dans le jeu. «  Je parle des autochtones, qui vivent en harmonie avec la Nature, avec la forêt, les arbres et la faune, qui ne la détruisent pas, qui s’en servent uniquement pour leurs besoins de vie…  » Oui, l’Homme, en tout cas cet Homme-là, fait partie intégrante de la biodiversité qu’il voulait que l’on intègre au jeu. Ce qui fut facile car les quatre cartes Début de partie du jeu sont celles avec un autochtone. Bref. Tu vois ce que je veux dire  ?

 

Et en effet, notre génération est complètement irresponsable, mais pas plus que la précédente ni que toutes celles d’avant. Elle s’est simplement donné plus de moyens et d’outils rendant cette irresponsabilité si délétère et puissante dans ses effets.

Quant à tes enfants… Au mien… Ça va tourner au truc de psy parce que c’est pour moi très compliqué, ce sujet-là. Pendant très longtemps il était hors de question que j’ai un enfant. Je trouvais cela complètement égoïste, justement à cause de ce monde qu’on laisse. Je pense vraiment que nous, nous verrons des choses extrêmement moches avant de disparaître.
Et eux, ben ils les vivront. Ou les survivront. Et c’est assez horrible. Quand on lit les projections des études sociologiques, mathématiques, les bouquins et articles des Paul Jorion et Stephen Hawking, et malgré tout l’optimisme du monde, on ne peut que comprendre comme tout ça va se passer, sans défaitisme aucun. C’est juste imparable. Alors c’est dur, même en jouant dans la vie, d’infliger ça à de nouvelles générations.

Florent à Essen

 

Puis le deuxième point fut que je n’étais pas prêt car il était hors de question d’avoir des enfants à qui ne rien transmettre qui me satisfasse. Ce deuxième point résolu et quelques arrangements de conscience tournant autour du fait qu’une nouvelle génération forte et inspiratrice pouvait améliorer le monde, alors mon petit Jean est arrivé il y a deux ans et demi  !

Dans tous les cas ils ne vivront pas normalement avec notre notion de la normalité, et je ne serais pas étonné que leur monde ressemble sur plusieurs points à pleins de mondes post-apocalyptiques ou post-hyperanthopicisation (je ne suis pas sûr que le mot existe mais on comprend, j’espère) que l’on a vu dans des films SF…

Et je me demande à quoi ressembleront ses promenades en forêts corréziennes…

C’est vachement agréable de causer avec toi, c’est léger, positif, enthousiasmant… Merci  !
 

 

6) Revenons à des événements plus joyeux.
Pourrais-tu nous raconter une anecdote marquante, drôle ou émouvante, que tu as vécu sur un festival avec un joueur ou un professionnel  ?

 

Oui, et puis c’est joyeux, ça va bien foutre la patate à tout le monde, ça va me foutre une belle image de déconneur, c’est cool.

Alors, j’attendais cette question. Enfin, non, je l’attendais pas, mais je m’y attendais. Bref. Au début je me suis dit que j’allais raconter un truc qu’il nous est arriver à Alex (Andredroa) et moi sur le off de Cannes, il y a deux ans. C’était drôle, émouvant, étonnant, pathétique. Mais vous ne saurez pas ce qu’il s’est passé entre nous et… Ben appelons le M. F.  !


Maintenant que je vous ai dit ce que je ne vous raconterai pas comme anecdote de festival, je vais vous parler d’une autre que je ne vous raconterai pas non plus en détails, qui s’est passée cette fois à Givors. Dans les grandes lignes, juste, ok… Mon stand jumelait le stand d’une boutique lyonnaise qui ne connaissait pas trop mes jeux, et du coup, tout content, je me suis dit que ce serait une chouette occasion pour que ça change. Tout happy, je vais voir le gazier en me présentant, car il avait oublié ma trogne, et dès que le nom du jeu Pom Pom sort de ma bouche, il me retourne avec une fougue non retenue  : «  Pom Pom, c’est toi  ? Ha mais c’est juste le pire jeu qui n’a jamais été publié  ! Les Aventuriers du Rhône (une assoce locale) nous l’avaient présenté comme un super jeu familial et simple, et j’ai trouvé ça nul  »  ! Ok… Enchanté.

Pour l’histoire j’ai revécu cette scène à l’identique avec le même mecton de cette même boutique sur un autre évènement un an plus tard…

Florent en Tric Trac Tv

 

Maintenant une vraie anecdote fun lors d’un évènement, mais non ludique.

Pour son préambule et sa compréhension, sachez juste que quelques mois avant nous avions organisé un concours pour la sortie de Lincoln, en proposant aux participants de réaliser un gag, une bd, un sketch, nous faisant marrer. Et qu’un des participants, bien après l’annonce des résultats, nous avait envoyer un mail pas content car il n’avait pas eu de retour et que c’était pas correct. Son mail de participation était malheureusement passé dans les spams, ce qui fut fort dommage car son dessin de très grande et belle facture… Je m’étais alors platement excusé…

Sachant cela, revenons-en aux faits  !

A Lyon, nous avons de très chouettes librairies BD, un milieu se portant localement comme le jeu plutôt bien, l’école Emile Cohl n’y étant pas pour rien. Une d’entre elles, Expérience, organise certains jeudis des soirées Beaujolais et saucisson autour d’un auteur, et tout le gratin de l’art séquentiel dessiné est dans les parages. Ce soir-là c’était autour de Tronchet et de son super livre Le Fils du Yéti. Et j’étais en train de bavasser avec Jérôme et Olivier Jouvray qui étaient aussi là (les dessinateur et scénariste de la série Lincoln, que nous avons adaptée en jeu, suivez, boudiou), avec plein de monde autour, quand soudain de tout à coup, quelqu’un me dit avec une petite voix toute petite  :

« -Bonjour, c’est vous Florent Toscano  ?

-Mmh… Oui…

-Ha, bonjour, je suis Jonathan Munoz, c’est moi qui avais participé au concours Lincoln et qui avais envoyé un sale message, et je suis super désolé, mais c’était juste une sale journée et du coup c’est vous qui avez pris…

-Ben non, c’est normal, en plus ton dessin était top  !  »

D’excuses en désolations de bienséance on engage en vrai la discussion, et j’apprends qu’il est dessinateur de bd. Il me montre ses deux premières œuvres, Un léger bruit dans le moteur et Les Dormants, et… Whouah  ! Le dessin du bonhomme  ! Une lumière géniale dans un univers trash… Et et… Et j’adore complètement.

J’étais en train de bosser, à cette période, sur ce qu’allait devenir Le Bois des Couadsous, le jeu de Blaise Muller (M. Quarto…) que nous avons la chance d’avoir développé. Et pourquoi ne pas demander à cet hirsute crayonneux de le mettre en forme  ?... J’envoie vite le blog de Jonathan à Blaise ainsi qu’à deux-trois personnes de confiance, et tout le monde est unanime… Et c’est comme ça que l’histoire a commencé, et que c’est Jonathan qui a si joliment et efficacement illustré Le Bois des Couadsous. 

Amusant, comme rencontre…  On s’est connu sur un clash puis il a illustré nos Couadsous et aujourd’hui on est potes !  

 

7) Justement comment fonctionnes-tu avec les auteurs et les illustrateurs?
Quels liens as-tu avec eux?
Dès que le jeu fonctionne techniquement, continues-tu seul ou bien gardes-tu l'avis de l'auteur pour l'édition  : illustrations, partenariats etc...
Jusqu'où l'auteur à le droit de donner son avis, et à quel moment s'arrête son travail?
Même question avec les illustrateurs.

Alors moi je suis très famille, tribu, clan… Donc j’ai besoin que les choses se fassent entre copains.  Je ne serais rien sans eux. Je me repose donc entièrement sur eux. Du coup je ne peux pas signer un jeu ou un illustrateur juste pour son travail, il faut qu’on s’entende bien, qu’on partage des choses, et que ça ne s’arrête pas à la signature ou à la sortie du jeu.

Pour les auteurs, c’est particulier étant donné que je suis l’auteur de la plupart des jeux édités chez les Jeux Opla. Du coup j’entretiens des liens très étroits avec moi-même, forcément. Et sans déconner, je me challenge tout seul, parfois, je suis une bande de jeunes à moi tout seul  !

Ensuite je m’entendais très bien avec Blaise Muller, donc ça a été avec joie que je lui ai proposé d’éditer les Couadsous. Juste un peu gêné car j’imaginais son jeu chez quelqu’un avec une force de frappe tellement plus puissante, le jeu étant pour moi si bon… Donc j’en suis très flatté. Et j’ai pas mal modifié le jeu par rapport à sa version, toujours en lui soumettant mes changements. On a vraiment, il me semble, fait l’histoire de ce jeu ensemble.

Pour Alexandre Droit et Pollen, là évidemment on est dans le très intime  !
 

Et pour Frédéric Vuagnat et L’Empereur, même si ce fut à une période très chargée pour moi, j’ai tenté au mieux de l’impliquer, et d’avoir son avis, et je continue à lui annoncer en temps réel les news…

Les illustrateurs, c’est pareil, on est très proches, tous. Il y a bien entendu la garde très rapprochée formée par Bony et Tony, puisque deux des trois gammées leurs sont entièrement confiées.
Et c’est des vrais copains que maintenant ce serait inimaginable qu’ils ne fassent partie complètement du bousin.

Florent et Tony Rochon dans une classe d'école

 

Et c’est vraiment main dans la main qu’on a illustré Lincoln ou les Couadsous avec respectivement les frères Jouvray et Jonathan Munoz. D’autant plus avec Lincoln que je les connaissais avant et qu’on a scénarisé le jeu avec Olivier pour qu’il paraisse comme un spin-off de la série de bd. D’ailleurs ce qu’on est en train de faire avec Alex et Guillaume Griffon pour Apocalypse au Zoo de Carson City. D’ailleurs, là, tout de suite, on est ensemble en train d’échanger sur la couv’ du jeu  !

Bref, pour résumer, un jeu ça se fait en équipe, à quatre, cinq, six mains, et chacun est indispensable. Avant, pendant et après. Je tiens beaucoup à ce que l’auteur et l’illustrateur soient motivés pour faire vivre le jeu une fois sorti…

Et c’est la même chose pour tout. J’ai besoin de mon monde, intime, à qui je fais confiance. Là, on rentre juste de Cannes où on a passé cinq jours géniaux, avec les meilleurs gens du monde qui constituent cette garde très rapprochée sans qui je ne serai pas grand-chose… Et là, avec Céline, Bony, Tony, Alex et Fabienne, c’était simplement parfait. Et je crois sincèrement que ça se ressent. Dans les jeux. Et sur les stands pour le public.

 

Tous, en tout cas, je vous aime. Peut-être un peu moins toi, là…

 

5 mains ? Avec un empereur manchot? ;-)

Ben je n’écris que d’une main, moi… Pas toi ?


 

8) Toi qui es très famille, j'imagine que pour mener une entreprise comme la tienne, cela amène à des sacrifices, familiaux notamment.
Comment gères-tu au quotidien les déplacements en festivals, les nombreuses heures de travail  ?
Emmènes-tu femme et enfant  avec toi?


C'est quelque chose que tu envisages de faire pendant encore longtemps ou cela est fatiguant physiquement et mentalement  ?

J’ai créé cette société avec Johanna il y a maintenant pas mal d’années, et elle m’a toujours soutenu dans toutes mes activités autour de ça, et je la remercie infiniment. D’autant qu’elle se charge de la partie cachée et indispensable, et fastidieuse, comme la compta…
Elle m’a régulièrement accompagné au début, puis est arrivé notre petit Jean, donc ça a changé notre façon de vivre  !
Alors même si aujourd’hui nous ne sommes plus ensemble, Joh fait évidemment partie de l’aventure qui aurait été différente sans elle, et encore elle est investie dedans. Et ça me fait du bien. Alors elle est bien plus séduite par le côté Nature que ludique, et sera bien plus heureuse et dans son élément au Festival de La Salamandre à Morges, en Suisse, qu’à Ludinord à Lille  !

 

Quant aux déplacements… C’est vrai que c’est fatigant, contraignant, coûteux, chronophage. Mais c’est là que nos jeux métastasent et surtout… C’est là que je me revitalise  ! Si je passe trop de temps sans faire jouer les gens, je déprime, je me dis que je fais de la merde, je remets tout en cause… Il faut vite que je fasse jouer  ! Et les salons et festivals sont les meilleurs endroits du monde pour rencontrer les gens et faire le plein de bonnes énergies  ! Là, ça faisait un moment que je n’avais pas fait de festivals, puis on a été à Istres fin janvier, et dès le premier matin plein de gens qui connaissaient nos jeux sont venus pour nous dire des gentils mots, et ça, ça n’a pas de prix  !
Et là à Cannes c’est l’apothéose !

 

Donc ça demande de l’organisation, et je ferais peut-être d’ailleurs de ne pas m’engager sur ce terrain-là parce que je ne suis pas le bonhomme le plus organisé du monde…

Joker  ?...

 

9) Tu disais avoir une relation très intime avec Alexandre Droit, souhaiterais-tu nous parler un peu de lui comme il a joliment parlé de toi dans son entretien dernièrement  ?

Je ne sais pas si je parlerais de lui aussi joliment qu’il l’a fait de moi récemment dans ton interview… Il a été bienveillant, en tout cas. Je crois qu’on se respecte beaucoup et que malgré quelques rares lieux de faibles divergences, on s‘accorde sur de très nombreux points dans de très nombreux domaines. Et surtout on aime déconner, bouffer et picoler. Et c’est très plaisant et indispensable d’avoir quelqu’un comme ça à qui finalement on peut à peu près tout demander sans gêne, et vice-versa.


Je ne sais pas trop quoi te dire, parce que ceux qui vont lire ça savent qu’on fait beaucoup de choses ensemble (hé, à midi, là, d’ailleurs, on a mangé une pizza-kebab ensemble  ! Et tout de suite, là, je suis en train d’échanger avec lui sur messenger à propose d’Apocalypse  !), et… En même temps, Alex, tout le monde l'aime bien, il est gentil, beau, le cheveu au vent, un mélange de De Niro et Dujardin, un corps de rêve, des coudes crochus… Comment tu veux ne pas t’entendre avec quelqu’un comme ça  !

Et on a réalisé de vrais trucs ensemble, à commencer par des jeux (Pollen, Apocalypse, Bok…), et la CAL, et…

Et tu me parles d’Alex, mais on pourrait causer à peu près pareil du troisième mousquetaire John G… Nicolas Bourgoin  !

Voilà quoi… Tu connais le dicton  : tout seul on va plus vite, mais ensemble, on est ensemble  ! Non, c’est pas ça  ? Pourtant c’est vrai  !

"Eh bah Alex ton interview Jeux Viens à Vous t'as pas fait beaucoup de lecteurs!" 
"Ta bouche Flo...ta bouche!"   

 

10) Eh bien parle nous de Nicolas alors  !

Facile, ça  ! C’est sympa, tes interviews, les mêmes personnes qui parlent des mêmes personnes  ! ben tu sais quoi, si tu me demandes comme à tous de parler de deux zigs du milieu, je ne parlerais même pas d’eux deux, tiens  !
J’aurais causé de Bony et Tony !

Et Nico, je pourrais dire à peu près la même chose que pour Alex, bien qu’il soit très différent. On est tous les trois très différents, mais ça matche bien…

Nico est beaucoup moins présent sur les événements, mais ses jeux le sont, eux  ! Normal, quand t’es le papa de cartons comme Mimtoo, Cortex…… C’est probablement un des mecs les plus gentils du monde, sous ses airs de John… Il sait être incroyablement présent quand il faut. C’est un super héros, c’est Monsieur Incroyablement Présent Quand Il Faut  !

 

11) Imagine que Nicolas ne soit pas présent, et que nous devions passer une soirée ensemble.
Nous nous connaissons pas ou peu
Proposes moi 3 jeux dans le but d'apprendre se connaître

Peut-être qu’on devrait juste boire des canons et discuter un peu pour mieux se connaître…

Je crois que j’aurais commencé par te faire jouer à Fauna, ce jeu génialissime de Filosofia. J’adore. J’aurais juste vu si t’es uniquement un hurmain (un humain urbain) ou si tu t’intéresses et connais un peu la nature…
Puis un Dixit, parce qu’on y place clairement nos références et on est ce qu’on aime…

Et enfin une fois qu’on aura défriché tout ça et rempli notre sang de quelques grammes d’alcool, passons à un Caractère, sans doute le jeu du genre le plus efficace  !

Ouh, ben je suis pas si vieux, pourtant je te propose pas des jeux d’hier, hein… Et tu ne noteras que je n’ai fait qu’un seul placement de produit pour les copains lyonnais  ! 
(François, c’est gratuit) !

 

12) La Compagnie des z'Auteurs Lyonnais, La cafetière...crois-tu que le monde ludique va inévitablement se structurer de cette manière  ?
Avez-vous d'ailleurs un local commun pour travailler ou la CAL est plutôt une idée philosophique  ?
Comment souhaiterais-tu vois cette aventure se prolonger?

Je n’en sais rien, je te dirai ça dans quelques années, le monde ludique change tellement. Par contre, les humains, quels qu’ils soient, oui, j’espère qu’ils vont se structurer de cette manière, parce que tout le monde y gagne, et c’est rassurant  !

La Cal est en effet exactement ça, une idée philosophique  ! Tout y est informelle. Pas de structure, pas de cadre administratif, pas de trucs chiants. Juste un endroit où les gens peuvent se rencontrer et échanger et générer de l’émulation pour l’ensemble du groupe et pour les individus. Pas de cadre, mais avec Alex et Nico on veille à ce que cette idée perdure. Et c’est génial, car grâce à ça on est désormais plus de trente auteurs lyonnais, avec des affinités qui font que certains se rapprochent, travaillent ensemble… Et depuis ça a permis des co-autorships édités, et pas des moindres (Nico et Johan pour Cortex, Fred et moi pour L’Empereur…), des envies communes de structures à créer avec Didier Lenain et Florent Mortier qui ont monté Ambiance et Jeux et Eludd… Bref, que du bon  !

Et c’est juste l’idée qui est belle. Aucune obligation pour personne. Si ce n’est de ne pas nuire à l’ensemble. Je souhaite donc juste que ça continue comme ça, que ça permette des rapprochements, que ça nous permette de mieux nous connaître quand on en a envie, que ça nous motive, que ça ne se professionnalise pas (à ce moment, ce ne sera plus la Cal telle que je la vois et je n’en serai probablement plus).

Bref, merci les gones et les fenottes, c’est cool  !

La mafia lyonnaise 

 

Puis on a quand même lancé le label CAL, avec le caltalogue chaque année, et ça c’est unique et top  ! Les revendeurs partenaires (pas loin de 40 dans le Grand Lyon maintenant) nous soutiennent à mort et adorent. Un catalogue issu d’initiatives personnelles uniquement avec des jeux de création lyonnaise  !

Et ce qui est cool, c’est de voir qu’on a donné des idées et que partout en France des structures similaires poussent  ! Bravo les amis de partout, vous êtes tous cools  !

 

Et je profite que tu me parles de ça pour clarifier les choses auprès de certains (de ceux qui sans doute se confortent à voir le mal où il n’est pas)  : l’idée n’est pas, et n’a jamais été, de dire que les jeux d’auteurs lyonnais sont meilleurs que n’importe lesquels. Il n’y a aucun protectionnisme dans la démarche.

 

Alors du coup, et c’est le plus important, je vais en profiter pour remercier tous ceux qui nous ont soutenus et ont compris le bénéfice d’une initiative comme celle-là… Alors merci à Matthieu d’Eppenoux et aux autres  !

 

Toi aussi comme chaque invité tu as voulu caser Matthieu d'Epenoux  ! ;-)
 

Difficile de faire autrement, vu le bonhomme…

 

13) En regardant la liste des jeux de Jeux viens à vous, quel jeu manque-t-il forcément à cette liste selon toi? 
http://manuvotreserviteur.wixsite.com/jeuxviensavous/jeux-

Attention, réponse très prétentieuse  ! Je te dirais La Glace et le Ciel  ! Ça craint de dire un jeu à soi  ? trop tard… Je suis très fier de mon jeu  !
 

En espérant qu'il rejoigne un jour la ludothèque de Jeux Viens à Vous alors.

Ça devrait pouvoir s’arranger pas trop difficilement… 

 

14) Tu as arrêté la recherche pour te consacrer au jeu, te vois-tu reprendre un jour ou le monde ludique te gardera désormais à jamais  ?

J’adorais vraiment ce que je faisais, l’équipe dans laquelle j’étais, les sujets… C’était extrêmement enrichissant. Et c’est un milieu où l’on développe un nombre et une variété de compétences phénoménales, dans plein de domaines. Un milieu qui évolue aussi très rapidement, et même quelques années à l’écart sont probablement fatales à un retour. Ou alors il me faudrait un très gros travail de mise à jour tant dans la littérature que dans la technique.

Et puis aujourd’hui je me plais vraiment dans ce que je fais. C’est beaucoup plus concret, évidemment plus facile à en parler, beaucoup moins frustrant et plus solutionnable  ! Il y a dans le jeu peu de problèmes qui ne trouvent une solution en quelques heures, jours, semaines, ou mois… J’ai connu des frustrations de plusieurs années dans la recherche sans parvenir à trouver une issue  !

Alors de là à ce que je reste dans le jeu à jamais… Tu te rends compte toutes les choses qu’on a à faire, à essayer, à découvrir, à tenter  ?... Et dans cette vie qui est si courte et avec ce temps qui passe si vite…

 

15) Le jour où tu quitteras le monde ludique, d’une manière ou d’une autre, que souhaiterais-tu que l’on retienne de toi  en tant que professionnel mais également en tant qu'homme  ?

Pfff… En fait tout amène sans doute des réponses prétentieuses… «  Il a été inspirant  » ou quelque chose du genre. Parce que je cherche toujours de l’inspiration dans ce que font les autres, j’ai besoin de ça, qu’on me donne du sens pour que j’avance. Alors j’essaye à tout prix de faire du sens dans ce que je fais, pour aussi inspirer…

En fait je ne suis pas sûr que ce soit autant prétentieux qu’incompréhensible… Sorry  !

Et puis qu’on retienne mes jeux  ! Nos jeux  !

Et puis je ne suis qu’une seule petite personne humaine, et cette personne est la même quand elle bosse sur des jeux, quand elle dort, quand elle est sur un salon, quand elle fait caca… Je n’ai jamais dissocié le perso du taf. Je suis le même, avec le même affect…
Alors de façon générale, je ne sais pas trop ce que je veux qu’on retienne de moi, mais si déjà on se rappelle de moi, on ne m’oublie pas trop vite, c’est bien…



16) C'est malheureusement la fin de cet entretien. Florent, en prenant en compte ta vie professionnelle et personnelle, es-tu heureux  ?

Comme dirait Arthur, «  c’est un peu plus compliqué que ça  »  !

Ce qui en revanche n’est pas compliqué c’est de te remercier de m’avoir proposé cette interview et de m’excuser auprès de ceux qui sont arrivés jusqu’au bout  !

Je te remercie Florent pour ta gentillesse et ta disponibilité 

 

A la fin de l'entretien, nous discutons ensemble et j'avoue à Florent que je n'ai pas posé l'une des questions pour ne plus embêter Florent avec des sujets graves. 
Florent curieux me demande de lui poser.


Voici donc cette question : 

 

17) Tu me disais être né à Cannes, le festival à lieu bientôt.
Christophe Boelinger, me parlait selon lui, des risques importants d'attentats lors de cet événement.
Qu'en penses-tu?


Comment analyses-tu également ce qui se passe actuellement entre la civilisations occidentale et celle du moyen-orient

Oui, je suis né à Cannes ! C’est fou, hein ? Hasard, coïncidence ? Je ne crois pas…

Le risque existe en effet. Il existe toujours. Mais par contre je ne vois pas tellement pourquoi il serait plus grand lors du FIJ ! Regarde les derniers attentats en France, et du coup on court à peu près le même risque au FIJ qu’à un concert, qu’en faisant nos courses, qu’en étant curaillon ou flic, ou qu’en allant voir un feu d’artifice. J’y pense parfois, mais ne m’encombre pas l’esprit avec ça. Ca va revenir, malheureusement, et on sera de nouveau démontés. Charlie a été le point de départ sur notre territoire, et peut-être le plus douloureux en ce qui me concerne puisqu’il a touché un truc et des gens qui m’étaient chers, qui m’inspiraient beaucoup, qui ont contribué à me construire. Charlie et ce que ça représente m’accompagne depuis une vingtaine d’années, et symbolise ce qui me plait. La disparition de Cavanna que j’adorais m’avait fait mal, mais je suis content qu’il soit parti comme ça plutôt qu’avec ses potes pas longtemps après sous les tirs haineux…

Bref.

Pour ce qui est d’analyser, je m’en garderai bien parce que j’en suis incapable. Je ne comprends juste pas. Je ne comprends juste pas qu’on se mêle de la vie de l’autre tant qu’il ne m’emmerde pas. Je ne comprends déjà pas qu’on croit en autre chose qu’en l’Homme. Et ensuite je ne comprends pas que certains puissent ne pas accepter des différences de convictions religieuses. Je ne comprends pas qu’on se mêle de qui veut coucher avec qui, deux hommes, deux femmes… Je ne comprends pas qu’on juge une personne sur sa couleur… Je ne comprends pas tellement de choses, qui me dépassent !

Je crois que toutes ces choses viennent juste de notre peur, de notre crainte. On est tous des peureux.

Et c’est tellement pire aujourd’hui que juste « entre les civilisations occidentale et moyen-orientale »… Les Etats-Unis de Trump font « presque » l’unanimité contre eux, unifiant une partie du monde mais le « presque » peut déclencher des conflits. L’Afrique crève et grossit à la fois. Le climat change et commence à impacter sur les civilisations. Tout ce merdier va faire que… Ben que ça pue, car tout de déglingue de plus en plus, et nous échappe…

Bref… On vit, c’est tout, concentrons-nous là-dessus, c’est déjà tellement beau et compliqué !

Attention, t’es prêt ? Double citation : « La vie est moche et c’est trop court… Tuez vos dieux à tout jamais, sous aucune croix l’amour ne se plait… ! « 

C’est ce qu’on a fait à Cannes, à part des rires rien n’a explosé, on a vécu tout complètement, et on rentre boostés comme des petits martinets !

 

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