Organisateur
d'événements ludiques
Jeux Viens à Vous Docteur Philippe Proux
Dites 33!
La 33 ème interview pour un Docteur... drôle non? Pure coincidence...
J'animai les jeux de Philippe Proux sans le savoir, Tasso, Fakir...
Un auteur/éditeur de jeux uniquement en bois
Philippe Proux est auteur mais également médécin généraliste dans les Ardennes
Un savoureux mélange qui m'a donné envie d'en savoir plus...
Philippe est un homme simple, intelligent et humain
Nous évoquons son métier de médecin, du milieu hospitalier, de sa rencontre avec le monde ludique, François Haffner et Yves Renou, sa façon de travailler les jeux et ses futurs projets...mais nous parlons également d'euthanasie, et même de Dieu...
1) Bonjour Philippe Proux, auriez-vous la gentillesse de vous présenter?
Ce n’est pas facile de se présenter…
Côté pile, je suis médecin généraliste en milieu rural depuis plus de 30 ans; côté face, je suis auteur de jeux en bois depuis plus de 10 ans; ou l’inverse… C’est cette dualité qui me plaît, mais qui déroute tout ceux qui se rassurent en mettant une étiquette à chacun.
On peut être Parisien et choisir la campagne boisée ardennaise. On peut être « intellectuel » et « manuel ». On peut avoir un métier concret et avoir un besoin de création. On peut s’intéresser aux choses graves et aux choses ludiques. C’est aussi une façon élégante de se présenter sans trop se définir…!
Pour la suite des questions, tu peux me tutoyer, c’est mon côté face. Le vouvoiement , c’est le côté pile….
2) Pourrais-tu nous expliquer ce que représente le jeu pour toi ?
En un mot: la convivialité.
"Tu n'as donc aucune ambition?"
3) Avant d'en venir à ton côté face, je voudrais m'intéresser à ton côté pile...enfin...à votre côté pile Docteur.
Tu exerces depuis plus de 30 ans un métier particulier, celui de médecin. Souhaiterais -tu nous raconter ce qui t'as fait opter pour ce choix étant jeune ? Ce que tu connaissais ou croyais connaître du métier avant de débuter tes études et qu'as tu découvert lors de ton arrivée en fac de médecine., mais surtout lors de ton premier stage en milieu hospitalier ?
Pour casser les idées reçues, je n'ai jamais eu "la vocation" de devenir médecin. Je ne suis pas issu d'une famille de médecin, et n'ayant été pratiquement jamais malade je n'ai pas eu l'occasion, heureusement, de côtoyer souvent la médecine. Pour provoquer je dirai que je suis devenu médecin par accident...
Comme je le disais dans la première question, je suis aussi un manuel. J'aurai aimé être menuisier ou charpentier, mais les pressions familiales m'ont poussé péniblement jusqu'au bac "D" (sciences naturelles). A cette époque le bac "D" était pour ceux qui n'étaient pas capables de faire la voie royale du bac "C" (mathématiques)...
Par ailleurs, ayant grandi à Paris, j'ai toujours voulu fuir cette ville pour aller vivre à la campagne. A cette époque ce n'était pas à la mode!
A l'heure du choix d'un métier, ce désir de ruralité était très forte et non négociable. Avec un bac "D", que faire à la campagne? Cultivateur? Trop éloigné de mon vécu. Curé? Je ne n'avais vraiment pas la vocation. Médecin? Irréaliste avec mon niveau scolaire. Je me suis donc mis à rêver d'être dentiste, avec le côté manuel qui ne me déplaisait pas. En plus j'évitais les cours d'anglais (une phobie) et plus tard un patron.
Pour faire des études de dentiste, il fallait s'inscrire à la faculté de médecine (la 1ère année était commune). Après deux ans de première année, je me suis retrouvé, avec surprise, sur la liste des étudiants qui pouvaient choisir entre les deux professions. J'ai donc opté pour la médecine. Pourquoi avoir délaissé la dentisterie? Je ne me le rappelle plus, probablement et bêtement par mimétisme avec les autres étudiants. Avec le recul, je ne regrette pas du tout ce choix, surtout lorsque je suis amené à examiner la bouche de certains patients: quel courage ont les dentistes... !
La faculté de médecine de Paris ne m'a pas laissé un très bon souvenir. Le carriérisme ne m'intéressait pas et le milieu hospitalier ne correspondait pas à mon projet professionnel. Plusieurs fois, devant ma volonté de devenir "médecin de campagne", j'ai entendu ce genre de réflexion: "tu n'as donc aucune ambition?" ou "si tu veux soigner les vaches, tu aurais dû faire véto"....
J'ai donc toujours été en décalage avec la faculté de médecine, si bien qu'à partir de la 3ème année, je n'ai assisté à aucun cours... Le matin j'étais à l'hôpital, l'après midi je restais chez moi avec des bouquins de médecine. Je rassure tout le monde, j'ai eu tous les certificats du premier coup... et le diplôme final!
Mon premier stage en milieu hospitalier, en fin de 2ème année, fut un emploi d'aide-infirmier à l'hôpital Foch de Suresnes, pour financer des vacances. Je me souviens particulièrement de m'être occupé d'un patient, monsieur D. et d'avoir longuement parlé avec lui. C'est à ce moment précis que j'ai réalisé que j'avais choisi un des plus beaux métiers et peut-être que j'avais "la vocation"...
Qui se cache derrière Ludarden?
4) En milieu hospitalier, beaucoup de médecins ne parlent que très peu avec les patients, souvent pour garder une distance. Les patients eux, n'osent souvent pas poser des questions par l'image sacrée qu'ils ont du médecin. Le médecin généraliste est considéré , lui, comme plus abordable
Dans les hôpitaux, les médecins sont d'abord des techniciens d'organes. Les patients ne font que passer devant eux. La relation médecin-patient est donc difficile car ils ne se connaissent pas. Pour bien communiquer il faut connaître l'autre pour adapter son langage et son message. C'est pratiquement impossible en milieu hospitalier. C'est beaucoup plus facile pour le médecin généraliste qui connaît le patient. Il peut employer le mot précis, la phrase exacte, anticiper les réactions, le tout dans un état de confiance et de connivence.
4 A) De quoi avez-vous parlé avec monsieur D ?
Ce n'est pas le sujet de la conversation qui a été important et qui relève de toute façon du secret médical. Mais c'est le fait que j'ai réalisé qu'une blouse blanche et un titre d'étudiant en médecine ouvraient des portes inconnues. Cette personne s'est confié, sans me connaître. Je l'ai principalement écouté et cette écoute à suffit pour qu'elle me dise à la fin: merci, vous m'avez fait du bien... J'ai eu, pour la première fois, l'impression d'avoir été utile. Depuis j'ai appris la médecine pour être encore plus utile!
4 B) Que trouves-tu dans cette relation avec tes patients que tu vois pour certains peut-être depuis 30ans ?
Un sens à ma vie professionnelle... La confiance ne s'achète pas. Pour faire de la bonne médecine générale, il faut cette relation afin de pouvoir comprendre le mieux possible les plaintes des patients. Cela permet d'éviter beaucoup d'erreur en sous-estimant ou sur-estimant ces plaintes. Cela permet aussi d'aller rapidement à l'essentiel dans les problèmes de "mal-être" (problèmes familiaux, problèmes dans le travail, problème socio-économique...). Le stress, l'anxiété, la solitude sont des causes de pathologies extrêmement variées et souvent trompeuses.
Malheureusement, il i y a de plus en plus d'interférences dans cette relation à cause des dérives de la société. Grâce à Internet, beaucoup croit être bien informé et pense pouvoir avoir un avis, même en médecine... La compétence et l'expérience de 30 ans de médecine sont parfois remises en cause par ce que dit une "Martine" dans un blog ou la belle-mère ... Navrant, désespérant et humiliant! Difficile aussi de comprendre toutes les dérives mercantiles autour de la "médecine" qui abusent de la naïveté des patients.
"Le médecin doit avoir deux qualités, la première et la principale c'est d'être compétent, la seconde c'est d'être humain."
4 C) La technique prend de plus en plus de place dans le milieu médical . D'ailleurs les stages hospitaliers prisés sont souvent les plus techniques (Radiologie, Réanimation...) et non ceux de gériatrie ou de psychiatrie Que souhaiterais-tu dire à de futurs étudiants ou aux jeunes internes sur l'important du métier de médecin ?
La technique est une très bonne chose pour la médecine. Elle rend d'énorme service quand elle est bien utilisée, c'est à dire quand la technique est au service de l'homme et non l'inverse (comme l'Economie ou la Finance, d'ailleurs...). La technique ne résout pas tout mais l'humanité non plus!
Que dire aux futurs médecins? Que le médecin doit avoir deux qualités, la première et la principale c'est d'être compétent, la seconde c'est d'être humain. Si, pour un spécialiste la compétence suffit pour être un bon praticien, il faut les deux pour être un bon généraliste. A chacun de trouver sa voie, mais la bonne!
Pour terminer une petite devinette: quelle différence il y a entre un spécialiste et un généraliste?
Le spécialiste sait tout sur rien et le généraliste sait rien sur tout!
5) Venons-en à ton côté face, auteur de jeux .
Peux-tu nous raconter tes premiers pas en tant qu'auteur?
Fréquentais-tu le monde ludique, travaillais-tu déjà le bois l'époque ?
Il y a-t-il une vocation pour devenir auteur de jeux? Si oui, je ne l'avais pas non plus... Je ne suis pas issu d'une famille de ludophiles ou de ludopathes. Je ne connaissais rien au monde du jeu, je ne savais même pas qu'il existait. Je suis donc devenu auteur de jeux par accident...
Comme déjà dit, j'aurai aimé être menuisier. J'aime travailler et manipuler le bois. Mais je n'ai jamais appris cet art et je n'ai pas le matériel adéquate, ni le temps suffisant pour m'y consacrer. Peut-être dans quelques mois...
Tous les prétextes étaient bons pour me permettre de bricoler et créer avec du bois. Evidement je faisais des jouets en bois à mes enfants à chaque Noël. Puis les enfants grandissant les jouets devinrent des jeux.
Prenant très au sérieux mon rôle de père, j'ai commencé par faire des jeux éducatifs (géographie, histoire, anatomie...) puis d'autres en partant de jeux connus que j'adaptais au bois et en changeant parfois les règles. Rapidement je suis arrivé à imaginer des jeux originaux plutôt abstraits puisque j'avais épuisé pratiquement tous les thèmes éducatifs... C'est à ce moment, Noël 1998, qu'un de mes enfants a reçu comme cadeau le magnifique, élégant, astucieux, "Quoridor" de Gigamic (avec, au recto de la règle, une invitation de l'éditeur à envoyer des idée de jeux). Une porte s'ouvrait, je suis entré dans un monde inconnu et j'y suis toujours...
J'ai envoyé de nombreux prototypes à Gigamic, sans succès, mais des petits mots manuscrits (à l'époque on correspondait par lettres!) m'encourageaient à poursuivre mes recherches. Les années se succédaient et ma patience était mise à rude épreuve. Finalement, en 2004, j'ai réalisé artisanalement quelques boîtes de Tasso que j'ai mises en vente à la boutique du musée de la Forêt située près de chez mois. J'étais ravi, mais les ventes restaient insignifiantes. J'avais décidé alors que mon aventure s'arrêtait là.
6) Et donc que s'est-il passé ?? Racontes ! Racontes !
Et alors?... et alors?... Zorro est arrivé! Blague que les moins de vingt ans ne peuvent pas comprendre... Blague que les moins de quarante ans ne peuvent pas comprendre.....
L'année 2006 était l'année de mes... 50 ans! Ceux qui sont passés par ce cap comprendront: c'est l'âge de la prise de conscience que le chemin à parcourir sera moins long que celui déjà parcouru...
Les projets ne pouvaient donc plus attendre: tout de suite ou jamais. Tout de suite, avec une possibilité d'échouer, ou jamais, avec une certitude de regrets.
La flamme n'était pas éteinte. Je repartais donc dans l'aventure en relisant pour la 100ème fois le fascicule de la "Maison des Auteurs de Jeux" qui prônait, pour démarrer, la micro-édition et la micro-distribution. Pour améliorer la distribution j'avais pris contact avec le conseil général du département pour faire d'autres dépôts-ventes dans les sites touristiques. En retour, il me proposait aussi de participer à un salon du bois.
La rencontre avec le public qui venait pour les chaudières et les charpentes, fut un détonateur. J'y ai vendu mes premiers Tasso en direct, mais surtout les encouragements de nombreuses personnes m'ont donné l'énergie d'aller plus loin..
J'ai donc pris la décision de faire 2 micro-éditions plus professionnelles (Tasso et Totem) et de les distribuer par internet en créant un site et "Ludarden". Tout cela avait un coût, mais j'avais la possibilité de m'auto-financer (merci la médecine!)...
La même année, toujours en suivant les recommandations de la "MAJ" et un surmontant ma timidité, je me suis inscris au concours de créateur de jeux d'Ugine (en Savoie, la montagne c'est mon côté "tranche").
Ugine 2006, a été pour moi la découverte du Monde du jeu. Outre l'accueil du public pour mes jeux, un prix pour le jeu présenté, ce fut la rencontre d'Yves Renou, de François Haffner, de Franck (Wambergue) et bien d'autres... Devant l'intérêt qu'ils ont porté à ce que je faisais, j'ai compris que de nouvelles portes s'ouvraient...
7) Comment s'est passé ta relation avec Yves Renou ? Quelqu'un à la fois de très simple, sympathique et discret
Tu dois mettre ta question au présent, car Yves Renou est toujours mon distributeur et donc nous sommes toujours en relation.
Je voulais dire ta rencontre
A Ugine, je ne le connaissais pas, je ne savais pas qui il était… Nous avons très rapidement sympathisé.
J’ai l’impression que nous avons de nombreux points communs.
Il m’a donné ma chance en acceptant de me distribuer avec mes tâtonnements, mes imperfections, mes erreurs, bref mon amateurisme.
Sans lui, Ugine 2006 aurait été un feu d’artifice et qui n'aurait été qu’un feu de paille (Yves comprendra!)
Je lui dois donc beaucoup. Je n’en dirais pas plus, car il ne doit pas apprécier les flatteries. Si jamais il lisait cet interview…
Festival d'Ugine
8) Je lui ferais savoir qu'il doit la lire ;-)
Souhaiterais-tu justement nous raconter une anecdote marquante, drôle ou pas, que tu as vécu sur un festival avec un professionnel ou un joueur ?
Justement c’était à Ugine 2006, en Savoie. J’étais en train d’expliquer le principe du jeu Tasso à plein de personnes agglutinées autour de la table. Soudain une voix se fit entendre: « Bonjour docteur! «. Je lève la tête et j’aperçois une de mes anciennes patientes, hilare en voyant mon air ahuri… J’étais démasqué à 700 km de chez moi!
9) As-tu déjà eu des idées de jeux ne s'adaptant pas à la création en bois, et qu'en as tu fait ? Ou penses-tu ton jeu dans ton esprit de manière à ce qu'il soit forcément en bois ?
Je m’étais jamais posé ces questions. Je me rends compte, en effet, que je crée directement pour le bois. Je pars toujours d’une forme, d’un mécanisme ou les deux, qui nécessitent du volume et/ou une force physique. Je me répète, je suis d’abord un manuel et j’ai besoin de « concret ». Je dois pouvoir rapidement visualiser et manipuler un prototype pour créer. Le bois permet facilement de créer des volumes. Il est vrai que je pourrais travailler avec de la fonte, du béton… mais je n’ai jamais rêvé d’être mouleur en fonderie ou maçon… Sur un site, un joueur se moquait (probablement gentiment) de Tasso en disant qu’on pouvait y jouer avec des parpaings ou des frites, cela évitait d’acheter le jeu…
A vrai dire, parfois je me force à sortir de mon ghetto en bois en essayant de créer des jeux de cartes, d’ambiance. Mais ne connaissant pas bien ce genre de jeux, je crains de réinventer des jeux déjà connus!
"La perfection peut manquer d'âme"
10) Tu es finalement également éditeur avec Ludarden, comment gères-tu la fabrication des jeux ? C'est quelque chose qui est en lien avec Paille, ou tu gères cela uniquement seul ?
Je me suis retrouvé "éditeur" sans le vouloir et sans m'en apercevoir... J'ai déjà expliqué que devant les refus successifs d'éditeurs, j'ai fini par réaliser artisanalement quelques boîtes de Tasso pour les mettre en vente dans un musée. Puis j'ai fait faire 2 micro-éditions en créant Ludarden.
A partir de là et avec les retombées d'Ugine, tout s'est enchainé lentement mais sûrement. J'avais le principal: un distributeur! J'ai donc recherché un professionnel du bois, un cartonnier et un imprimeur. Tout m'était inconnu, le système de distribution, le marketing, la TVA, la comptabilité BIC, mais aussi le filmage des boîtes, les codes barres... N'ayant pas beaucoup de moyen et en pensant que Ludarden ne survivrait pas très longtemps, j'ai tout fait seul, petit à petit, au jour le jour. J'en suis encore là, par obligation mais j'y trouve aussi beaucoup de plaisir!
Le coté éditeur est très intéressant car il oblige à s'intéresser aux contraintes économiques du jeu, au marketing... Les contraintes économiques sont naturellement les plus frustrantes pour un créateur. Maintenant j'intègre ces contraintes directement dans la conceptions des jeux. Pour cela j'ai dû apprendre et connaître le coût de quelques points techniques de la menuiserie: la tournerie, la tabletterie... la mise en peinture au tambour, au pistolet... les essences de bois... J'ai dû aussi apprendre à connaître les techniques relatives à la cartonnerie et à l'imprimerie. Malheureusement j'ai dû aussi apprendre à composer avec la mondialisation en faisant fabriquer Fakir en Chine, via une entreprise Belge. C'était la seule solution pour que ce jeu puisse être édité. Tous les autres jeux sont fabriqués et montés dans la Jura.
Tout ce travail se fait par courriel, seul, pendant mes temps libres.
Pour un créateur, faire de l'auto-édition permet surtout de suivre sa création jusqu'au bout. Le jeu final, dans la boite, c'est son jeu! Dans mon cas, l'auto-édition est logique.
Evidemment, en s'occupant de tout, il est possible qu'il manque un peu de professionnalisme au produit final... mais cela peut être aussi un atout! La perfection peut manquer d'âme!!
Philippe explique Tasso
11) Quels sont tes futurs projets de jeux, mais également en terme d'ambition pour tes jeux actuels ?
Les projets ne manquent pas… Plusieurs prototypes sont pratiquement finalisés. Masker, primé à Ludix 2016, est entre les mains d’un agent; un essai, il faut innover et découvrir d’autres facettes du monde du jeu.
En ce qui concerne les ambitions pour les jeux actuels, j’aimerais les confier à des éditeurs ou distributeurs étrangers. Malheureusement, mon anglais étant très approximatif (voir le début de l’interview…) je n’ai pas la possibilité de les présenter à Essen ou à Nuremberg. Je compte sur des contacts improbables comme celui de Junghee Choi. C’est un coréen qui m’a contacté, il y a 1 an sur Facebook, intéressé par ma gamme de jeux. Actuellement Fakir est distribué en Corée, et probablement Tasso le sera très prochainement. Je suis très loin du dépôt-vente du Musée de la Forêt de Renwez d’il y a 11 ans….
Mes ambitions initiaux sont donc déjà pulvérisées et je ne suis pas assez jeune (ou trop vieux) pour mettre véritablement le « turbo »…
12) Tu parles d'agent, c'est quelque chose qui se démocratise actuellement dans le monde du jeu, en lien avec son essor, mais je n'en ai pas forcément de bons retours de certains professionnels. Qu'est est ton avis sur le domaine ? Quelles sont tes attentes, et quels sont tes premiers retours ? Enfin selon toi quelles en sont les limites dans le monde du jeu ?
Je n'étais pas demandeur. C'est l'agent qui m'a proposé de présenter Masker à Nuremberg. Après réflexion, j'ai donné mon accord en pensant que je donnais une chance à ce jeu d'avoir un meilleur avenir que celui que je pouvais lui proposer. C'est aussi par curiosité que j'ai accepté, afin de découvrir un autre aspect du monde du jeu. Actuellement le projet est en cours, je ne peux donc pas en dire plus... Dans quelques mois, je pourrais en tirer des conclusions.
Je ne connais pas assez le fonctionnement des agents pour en connaître leurs limites
"Le monde rural m'apporte surtout "l'horizon"!"
13) Que t'apporte le monde rural que ne t'apportait pas Paris ? Est-ce pour la qualité de vie, ou pour la mentalité différente?
Le monde rural m'apporte surtout "l'horizon"! Je me sens toujours agressé quand mon regard est stoppé par un mur. Et à Paris, il y a beaucoup de murs...
Par ailleurs, comme je l'ai déjà dis, j'aime le concret. Le monde rurale, c'est la terre que l'on peut toucher, c'est rassurant... La ville me semble un monde très superficiel et très fragile.
La vie rurale à ses bons et ses mauvais côtés. En ce qui concerne la qualité de vie, le fléau de la balance penche nettement vers le bon côté.
Internet permet de palier à un certain isolement. Je peux témoigner que l'on peut habiter dans un petit village des Ardennes et être branché sur le monde entier, comme un parisien!
En ce qui concerne la mentalité rurale, s'il y en a une, elle évolue beaucoup et dépend surtout des personnes... Le fléau de la balance peut donc osciller, mais il y a globalement plus de convivialité.
Démonstration de Totem
14) Une dernière question sur le monde médical, et nous terminerons par une série de questions plus légères sur le monde ludique. En tant qu'infirmier j'ai été confronté à des gens malades, me regardant droit dans les yeux et me demandant d'abréger leurs souffrances, pour dire le mot sincère, de les tuer. Si l'éthique de nos métiers nous en empêche, l'approche humaine peut être différente. Certains médecins ont fait le choix parfois de choisir l'approche humaine, en mettant en danger leur diplôme. Actuellement 2 hommes politiques, Benoit Hamon et Jean-luc Mélenchon ont proposé dans leur programme de proposer une loi sur l'euthanasie. Qu'en penses-tu ? As-tu déjà confronté au même cas que le mien et qu'as tu dit à la personne ?
Quelle question! Je ne pensais pas parler de l’euthanasie en commençant cet interview! La prochaine question sera: Et Dieu dans tout cela? (blague que les moins de…)
Louis Pasteur disait « Guérir parfois, soulager souvent, écouter toujours ».
Dans le court terme, quand la médecine ne peut plus guérir, il faut donc soulager les douleurs…jusqu’au décès: c’est la sédation. Il y a une loi qui l’encadre.
Je ne suis pas hospitalier, mais de nombreux témoignages de patients me disent que la fin de vie de leur proche a été bien prise en charge dans les services hospitaliers.
Au domicile des patients, je pense que les médecins généralistes essayent de se débrouiller avec le patient, la famille, l’équipe soignante et eux-même.
Dans la grande majorité des cas il y a des possibilités de prises en charge de la douleur physique et morale jusqu’au décès.
Le plus difficile, c’est de gérer la fin de vie chez des patients très âgés qui ne souffrent pas particulièrement physiquement, mais qui se dégradent plus qu’ils ne le souhaitent et s’en rendent compte. On est devant des souffrances psychologiques difficiles à prendre en charge, correctement, sur du moyen ou long terme. La déchéance physique peut être insupportable pour certain. Et que dire des patients ayant une maladie d’Alzheimer… Aucune loi n’encadre ces douleurs morales.
C’est dans les maisons de retraite que j’entends cette demande d’abréger une vie qui n’a plus de sens.
Il n’y a pas de recette dans ces prises en charge. Il ne reste plus que l’écoute, trouver le bon mot, la bonne phrase, la bonne intonation, puisqu’il difficile de soulager et impossible à guérir…
Je pense à une de mes patientes, en maison de retraite, âgée de 94 ans, ayant tout sa tête mais sur un corps assez délabré, qui me demande à chaque visite « une piqure pour retrouver son mari », puis me demande de ne rien oublié sur l’ordonnance et la date de ma prochaine visite…
Une loi sur l’euthanasie? Elle viendra un jour, mais je crains plus pour régler un problème financier que pour trouver une solution à un problème moral…
Personnellement, je pense que nous n’avons pas eu le choix de naître, nous devrions l’avoir pour partir dans la dignité.
Pour ceux qui se posent ce genre de problème, sachez qu’il existe une possibilité de choisir une personne de confiance qui pourra gérer votre fin de vie dans le cas où ne seriez plus capable de le faire:
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2016-03/da_personne_confiance_v9.pdf
Dans la journée je repensai à la question et je me disais également que la dégradation en maison de retraite est certainement l'une des plus compliquée à gérer car bien souvent il n'y a pas de sédation lourde mais les dégradations physiques (escarres...) et psychologiques peuvent durer des semaines, des mois voire plus.
15 A) Et Dieu dans tout cela? ;-)
Joker! Monsieur Chancel.
Et puis non, je vais répondre à la question.
Dieu est, pour moi, un super anxiolytique nécessaire à beaucoup d’humain pour traiter, à toutes les époques, leurs angoisses existentielles.
Au début de l’humanité c’était le lever et le coucher du soleil, la foudre… le sens de la vie et de la mort. Maintenant c’est l’avant big-bang, l’univers infini en expansion…le sens de la vie et de la mort.
Les sciences ont déplacé quelques questions, pas toutes.
Le problème avec les traitements anxiolytiques, c’est le surdosage!
Philippe explique Nivos
15 B) Je te proposes 1 0 personnes du monde ludique, et je souhaiterai que tu les définisses chacun en un mot, oui un seul !
Yves Renou, Bruno Faidutti, Florent Toscano, François Haffner, Bony
Matthieu d'Epenoux, Vincent Dutrait, Yahndrev, Maeva Kosmic, Juan Rodriguez
Yves Renou: rouge
Bruno Faidutti: vert
Florent Toscano: blanc
François Haffner: brun
Bony: vert
Matthieu d’Epenoux: violet
Vincent Dutrait: ocre
Yahndrev: Blanc
Maeva Kosmic: Bleu
Juan Rodriguez: Orange
J’ai tendance à associer des couleurs à tout. Une forme d’autisme, paraît-il?
16) Nous passons une soirée ensemble mais nous ne nous connaissons pas, préfères-tu faire un canular téléphonique à François Haffner un verre de Saint Véran à la main ou bien choisir 3 jeux dans le but d'apprendre à se connaître ?
On commence à se connaître, en jouant ou ne jouant pas. Puis on boit un verre de St-Véran, puis on fait un canular téléphonique à François Haffner.
17) Le jour où tu devras quitter le monde du jeu, d’une manière ou d’une autre, que souhaiterais-tu que l’on retienne de toi professionnellement mais surtout humainement?
Professionnellement, que l'on retienne autre chose que "c'était l'auteur de Tasso".
Humainement, que l'on retienne autre chose que "il se prenait au sérieux".
Prix pour Fakir
18) Malheureusement, c’est déjà la fin de cet entretien, Philippe, en prenant en compte, ta vie professionnelle et personnelle, es-tu heureux ?
D’abord qu’est-ce que le bonheur?
Ensuite je n’ai pas qu’une vie professionnelle, mais deux (cf cet interview). Quand à ma vie privée, j’en ai…
En faisant la synthèse de toutes ces vies et après une longue réflexion, je peux te rassurer et rassurer tous ceux qui vont lire cet interview: je suis heureux!
Je sens que vous êtes soulagés et heureux de le savoir! Merci.
Si tu as fini tes questions, puis-je t’en poser une?
Merci Philippe pour ta gentillesse et ta disponibilité
Oui c’est effectivement terminé, alors vas y si tu as une question
As-tu déjà eu l’idée de t’auto-interviewer?
Si la réponse est négative: essaye, c’est mieux qu’une séance chez le psy!
La semaine prochaine, je recevrai un illustrateur qui n'est pas vraiment un âne...
Pour ceux qui souhaiteraient soutenir mes entretiens, voici ma page tipeee, même un petit geste fait plaisir et vous pourrez contribuer à d'autres interviews réalisés sur des festivals (Cannes, Essen...) :
Merci à mes Tipeeeurs de me soutenir : Arnaud Urbon, Bruno Faidutti et Emilie Thomas, Nicolas Soubies et dorénavant Virgile De Rais
Pour ceux qui souhaiteraient découvrir les précédents entretiens, mes animations ou suivre ma page facebook :
http://www.facebook.com/jeuxviensavous/
Yves Hirschfeld
Benoit Forget
Bruno Faidutti 1ère partie
Bruno Faidutti 2ème partie
Naiade
François Haffner 1ère partie
François Haffner 2ème partie
Pierô Lalune
Timothée Leroy
Mathilde Spriet
Sébastien Pauchon
Tom Vuarchex
Vincent Dutrait 1ère partie
Vincent Dutrait 2ème partie
Christophe Boelinger 1 ère partie
Christophe Boelinger 2ème partie
Régis Bonnessée
Roberto Fraga 1ère partie
Roberto Fraga 2ème partie
Cyril Demaedg
Bruno Cathala 1 ère partie
Cyril Blondel
Bruno Cathala 2ème partie
Yahndrev 1ère partie
Yahndrev 2ème partie
Emilie Thomas
Sebastien Dujardin
Florian Corroyer
Alexandre Droit
Docteur Mops 1ère partie
Docteur Mops 2ème partie
Arnaud Urbon
Croc
Martin Vidberg
Florent Toscano
Guillaume Chifoumi
Nicolas Soubies
Juan Rodriguez 1ère partie
Juan Rodriguez 2ème partie
Bony
Yannick Robert