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Jeux Viens à Vous Franck Dion 2ème partie

La semaine dernière, je débutai mon entretien avec Franck Dion, ce magnifique auteur notamment de 4 courts-métrages mais également d'illustrateur de jeux de société

Dans cette seconde partie, nous évoquons Monsieur Cok et un scoop de Franck Dion, nous parlons longuement d'Edmond était un âne et de toutes ses subtilités, d'Une tête disparait son dernier court métrage en date, du comment se finance un court métrage et de la raison pour laquelle il s'intéresse tant à la psychiatrie... 

 

10) Venons en à l'ouvrier barbu de Monsieur Cok, qui semble prêt à tout, même à mourir semble t-il pour arriver à ses fins et ne pas perdre sa dignité
Ma question est volontairement provocatrice, Franck Dion fait-il l'apologie du terrorisme que tu as connu lors de ta jeunesse avec les brigades rouges ou Action directe ?

C'est une question très intéressante car elle m'a été posée par quelqu'un, un américain qui était de passage à Paris, qui au milieu de la nuit, dans son hôtel voit Monsieur Cok qui passait sur Canal +, et le mec s'est fendu d'un mail très élogieux sur le film en m'expliquant qu'il avait fait la guerre en Irak, la première guerre en Irak, et qu'il trouvait le film extrêmement pertinent mais qu'y avait une chose qui l'avait chagriné, la fin, qui était pour lui une apologie du terrorisme . Je lui ai répondu que ce n'était pas du tout une apologie du terrorisme, mais que c'était le retour à l'envoyeur.
En fait cet obus explose parce qu'il était programmé pour exploser et ça tombe bien. Le barbu ne ramène pas l'obus pour le faire exploser, il ramène l'obus pour le rendre à l'envoyeur.
Mais en aucun cas ce n'est une apologie du terrorisme.

Même si j'ai des très fortes sympathies pour le mouvement anarchiste, je ne suis absolument pas pour la violence armée, je n'y crois pas.
Je pense que c'est vain, je pense qu'on arrive à ses fins avec un activisme pacifique comme l'avait fait Gandhi, Mandela ou Martin Luther King, l'un de mes personnages historiques préférés. Je ne crois pas en la lutte armée. Je réfute toute allégorie bien sûr du terrorisme surtout après les vagues épouvantables d'attentats contre Charlie, le Bataclan...

Je pense que c'est pas tout à fait clair dans le film, tu n'es pas la première personne à me le dire.
C'est bien que je puisse faire une mise au point la-dessus

Monsieur Cok
 

Du coup, l'obus serait un symbole de la crise ?Le barbu ramènerait la crise au responsable ?

Ouais ouais, c'est pas idiot, ça peut être le symbole de la crise qui vous pète à la gueule.
Mais c'est surtout le symbole du retour à l'envoyeur, le symbole de l'horreur de la guerre, de l'horreur de la mise à l'écart, de l'humiliation...

Moi ce qui me plaît dans ce barbu...on l'appelait toujours le barbu énervé !
C'est le seul qui a des yeux, tous les autres n'ont même plus d'yeux, ils ne voient rien...c'est des poupées de chiffons ! Lui, il est en colère !
Alors bien sûr, il n'est pas sympathique...Alors que c'est le gentil.
Et Cok, lui est extrêmement sympathique, alors que c'est une ordure absolue.
J'aime les gens énervés, qui ne lâchent pas l'affaire.Il ne veut pas des milles et des cents, il veut la justice. C'est tout.
Ca, ça me plaisait beaucoup.
les fonds de pension c'est le cancer après le fascisme ou ptet avant le fascisme je ne sais pas mais c'est le cancer du monde moderne .

Le Barbu énervé 

 

"Les fonds de pension c'est le cancer, après le fascisme ou ptet avant le fascisme, je ne sais pas, mais c'est le cancer du monde moderne"

 

11) Et pour finir sur Monsieur Cok, comment vois-tu l'évolution dans l'avenir des futurs Monsieur Cok et de leurs ouvriers ?

Déjà un petit scoop...
On entrevoit très fortement de faire Monsieur Cok 2

 

Ah ! :-) 

Dix ans plus tard, pour fêter les dix ans de Monsieur Cok, on à très envie de faire Monsieur Cok, qui s'appellera d'ailleurs Monsieur Cok 2 !

C'est un gros pied de nez au monde du court métrage d'auteur car ça à le titre d'un block buster, donc rien que ça, ça me fait marrer ! (Rires)

Donc Monsieur Cok 2, qu'est ce qui fait aujourd'hui ?

Dix ans plus tard Parce que bien sur la poule qui pond les Cok est restée fonctionnelle.

Je pense comme beaucoup d'entre nous, que les messieurs Cok d'aujourd'hui et depuis longtemps se sont déplacés vers la finance .
Que les fonds de pension c'est le cancer après le fascisme ou ptet avant le fascisme je ne sais pas mais c'est le cancer du monde moderne .
Les ouvriers.... y en a de moins en moins, vu qu'y a de plus en plus de chômeurs... Je ne suis pas optimiste la -dessus, vraiment... Je pense que les politiques... ça ne peut venir que d'en bas !
Ca ne peut venir que par les associations, les initiatives personnelles pour avoir un monde meilleur.
Quand c'est relayé par des partis politiques c'est très bien mais malheureusement ils ont plutôt tendance à relayer la facilité, « c'est comme ça on y peut rien, il faut faire avec ».

De toute façon si l'imagination était au pouvoir ça se saurait ! Or c'est pas le cas, l'imagination elle est chez nous, elle est chez ceux qui crées des associations, des trucs vraiment audacieux, intéressants...

 

12 ) Passons maintenant à Edmond était un âne, une œuvre de toute beauté.
Tu y parles d'un homme timide atteint d'un Trouble de l'identité, ayant un besoin d'émancipation, d'assumer qui il est vraiment,cela par un chemin intérieur tout le long du film Franck Dion s'est-il trouvé au fil du temps ou te cherches-tu encore ?

Je me cherche encore, même si je me suis en partie trouvé...ça c'est grâce à l'âge !
Toute notre vie, on chemine, et heureusement d'ailleurs, y a rien de pire que les gens qui se croient arrivés !
C'est une erreur je pense. Je continue mon petit bonhomme de chemin !

 

13) Le film montre le regard de l'autre sur soi et comment l'individu tente de s'intégrer ou de se cacher parmi la masse Tu disais ne pas vouloir en faire un monstre et qu'il avait également ses torts, ce qui me semble pertinent. Mais ne pourrait-on pas voir en Edmond un monstre au sens étymologique et antique du terme , celui que l'on désigne comme potentiellement divin, celui qui est différent, sans que cela soit péjoratif.

Bien sur ! Bien sur ! C'est un monstre...
Tout est monstrueux chez ce personnage !
Sa petitesse est monstrueuse, la grisaille de la simplicité dont il fait preuve au début du film est monstrueuse et puis après son émancipation est monstrueuse.
Je ne voulais pas en faire un monstre au sens péjoratif du terme mais au sens étymologique bien sur c'est un monstre.

Edmond était un âne

 

Et au final, penses-tu qu'Edmond fait le choix d'être celui qui l'est ou a t-il toujours été ainsi ?

Je pense qu'il a toujours été comme ça. Il a toujours été un âne. Sauf qu'il se découvre...C'est une révélation quasi divine, c'est une révélation au sens religieux du terme. Il a trouvé son chemin. Et il décide de s'assumer.
Moi ce que j'aime dans ce personnage...de toute façon j'aime toujours les personnages que je fais, je ne peux pas faire de film sur des personnages que je n'aimerai pas , même les pires salauds faut que je les aime sinon ça marche pas ! Donc oui ce que j'aime dans ce personnage c'est que lui non plus il ne lâche pas l'affaire , il est déterminé à faire valoir aux autres son identité, et il se fout complètement du regard qu'on pose sur lui. Là aussi il est monstrueux ! Il fait preuve d'une indifférence totale au jugement des autres.

Et pourtant il est entouré de gens qui l'aiment, il est soutenu.
Y a les abrutis qui sont plus cons que méchants d'ailleurs mais s'ils ne sont pas agréables à son égard c'est aussi parce qu'Edmond ne leur à jamais dit bonjour , y a ça aussi ! Il a un côté très méprisant ! A force d'être ailleurs, c'est pris comme du mépris.

Moi j'aime bien l'idée de la monstruosité qui revient encore, c'est assez juste.

 

14) Serait t-il osé d'y voir un parallèle avec une homosexualité refoulée d'Edmond, qui ne souhaite plus que son épouse le touche, qui va chez Tata fiesta et découvre son vrai soi ? Il va en psychiatrie, l'homosexualité, que la psychiatrie désignait comme une maladie il n'y a pas si longtemps encore. Absolument. C'est un parallèle auquel tu as pensé ou pas du tout ?

Complètement... Complètement....

Mais pas vraiment l'homosexualité, je pensais au transgenre.
A savoir cette cruauté incroyable qui consiste à faire naître des gens dans une autre peau que la leur. Je trouve que c'est un problème dont on ne parle pas assez. C'est vraiment une cause à défendre.

D'ailleurs chose intéressante, le film est censé se passer en 68 à New-York aux états-unis , et pourquoi 68 ?
Parce que c'est l'année de la mort de Martin Luther King.
Chez Edmond et sa femme y a un portrait de Martin Luther King.
On peut imaginer qu'ils ont été partisans de Martin Luther King Martin Luther King, et le mouvement des droits civiques défendait aussi la cause homosexuelle et aussi la cause des transgenres .
Ca on le sait moins mais il ne défendait pas seulement les noirs, mais il défendait aussi les minorités opprimées. Je trouvais intéressant de savoir qu'Edmond et sa femme étaient dans ce courant de pensées.
Et bien évidemment quand j'ai écrit cette histoire, c'est une parabole du trouble de l'identité sexuelle donc ça parle avant toute chose des transgenres .

 

15) Dernière question sur Edmond, d'où t'es venu l'idée d'Edmond, et de son trouble de l'identité. Est-ce qu'on peut le voir également comme un schizophrène, emprunt d'hallucinations devant le miroir, qui cède à son délire afin peut être d'aller mieux, mais qui se suicide ne pouvant supporter la dure réalité , comme cela est très souvent le cas pour les personnes atteintes de cette maladie?

Sur le terme purement psychiatrique, c'est un homme malade ça c'est évident.
Le film est tourné vers l'intérieur, du point de vue du personnage, donc il n'est pas question de maladie , sa femme en parle, on voit bien qu'il ne va pas bien... Il se prend quand même des électrochocs dans la tronche !
En même temps c'est l'époque des électrochocs. On soignait les gens comme ça...

Sur un plan objectif, oui c'est un homme complètement malade . Alors est ce qu'il est schizophrène ? Est ce qu'il est atteint de délire ? Tout ça en même temps ? Sa pathologie, je la connais pas !

Je m'étais renseigné auprès de psychiatres.
Déjà un homme qui se prend pour un animal ça n'existe carrément pas . Y a ça dans les religions animistes, y a beaucoup de rapport entre les hommes et les animaux, des hommes qui se prennent ou se transforment en animaux, mais dans nos sociétés, ça n'existe pas. Rien que ça c'est assez original.

De mon point de vue, oui c'est un type très malade, très très malade, victime de délire, d'hallucinations, et qui effectivement arrivé au sommet de ses angoisses, se tourne vers l'irréversible .

 

Dernière petite question par rapport à ça, le miroir devant lequel il a ses hallucinations, se trouve-il être comme dans Alice, le symbole qui fait sauter le pas au personnage et à son délire ?


Le miroir c'est un symbole pour toi ? D'ailleurs on le retrouve dans L'inventaire fantôme...

Oui, j'aime bien les miroirs, c'est joli. Ca donne de beaux cadres.

Non sincèrement j'ai pas pensé à ça...je prends le miroir pour ce qu'il est, le reflet de soi. Et là, le reflet d'Edmond c'est l'âne, parce que c'est un âne.
Je l'utilise de manière très basique en fait

Edmond était un âne

 

16) Passons au dernier court métrage en date qui est Une tête disparaît, lui aussi un très joli film sur la démence sénile, la maladie d'Alzheimer, sans doute, et l'impact qu'elle a sur les personnes atteintes de cette maladie, mais aussi sur leur famille, l'être aimé qui disparaît peu à peu. Cette vieille, se bat pour garder son autonomie, elle souhaite rester adulte, ne pas devenir l'enfant de sa fille, jusqu'au moment de la gifle, symbole du basculement des rôles.

Oui tout à fait !

 

J'ai l'impression comme pour Edmond, que tu n'as pas souhaité en faire un personnage pur. La vieille mène la vie dure à sa fille. J'ai vu que tu t'intéressais beaucoup à la psychiatrie, moi à la base je suis infirmier, j'ai travaillé en psychiatrie, donc ça m'a beaucoup intéressé. C'est une expérience que tu as connu personnellement ? Si c'est le cas peux-tu nous parler de la difficulté, la souffrance et la culpabilité parfois que ressentent les familles ?

Alors... moi tout est dans le film...

Effectivement j'ai été confronté à ça avec ma grand-mère, qui n'est plus de ce monde. Elle c'était une maladie neurodégénérative qualifiée de démence sénile. Elle avait de longs couloirs de six mois, quand elle se réveillait , elle me disait « J'ai fait un rêve éveillé de six mois » C'est ça qui m'a vraiment inspiré l'univers de Jacqueline, un univers qui n'est pas forcément violent, qui est complètement poétique, complètement barré, un univers qui n'est pas fait que de souffrance, même si la souffrance l'atteint quand elle perd sa tête, mais avant cela c'est un univers plutôt sympa, chaleureux, rassurant... elle repense à son papa, au poulet sans tête...

Une tête disparait

 

Le film s'attache à mettre au second plan la fille de Jacqueline, puisque là encore c'est un point de vue de l'intérieur du personnage de Jacqueline, c'est un faux suspens évidement, car on comprend tout de suite que c'est sa fille et qu'elle ne la reconnaît pas, mais je trouvais intéressant pour accentuer cet aspect totalement désarmant de quelqu'un qui ne vous reconnaît plus , de plus est sa mère c'est terrible, une violence inouie, C'était ma façon de traiter ce rapport.

 

C'est ta grand-mère maternelle ? Paternelle ?

Ah ben moi j'ai pas connu mon père donc ça ne pouvait être que ma grand-mère maternelle qui m'a en partie élevé au début de ma vie à Trappes.

 

Et du coup, tu en parles si tu veux ou pas, j'imagine que tu as vu ta maman souffrir de la maladie de la sienne

Bien sur ! Maman, et puis sa sœur, c'est extrêmement difficile, c'est une saloperie de maladie. Surtout que ma grand-mère était une femme particulièrement intelligente, cultivée, et voir quelqu'un de brillant comme ça partir en sucette c'est terrible. !
Oui c'est moche...

La fille de Jacqueline

 

"Soit on est de gauche, soit on l'est pas, nous on est de gauche donc on essaye de s'y tenir de manière bête et brutale."

 

17) Je vais te parler maintenant d'un côté plus technique par rapport au film, tu as expliqué que la production avait duré 10 mois . Peux-tu nous expliquer comment fait t-on vivre une équipe durant 10 mois sur un court métrage ? Quelle est la rentabilité d'un court métrage tel que celui-ci ? Nulle ? Avec une vente à l'international ? Un court métrage est-il nécessairement déficitaire et vit des subventions?

En ce qui concerne la production du film, je ne fais jamais un film si les financements ne sont pas bouclés. Et les financements d'un film c'est 95% de salaires. On a crée une boite de production avec des amis réalisateurs et notre politique c'est avant tout de salarier les gens. Hors de question de faire bosser les gens avec leurs indemnités d'intermittents du spectacle, hors de question de faire travailler les gens gratuitement, tout le monde est assuré et cotise au chômage et tout le monde est payé au minima des conventions collectives. Soit on est de gauche, soit on l'est pas, nous on est de gauche donc on essaye de s'y tenir de manière bête et brutale.
 

En ce qui concerne le financement d'une tête disparaît ça ressemble à tous les films que j'ai fait chez Papy 3D, c'est à dire que la pierre angulaire c'est le CNC (centre national du cinéma et de l'image animée) qui apporte la plus grosse part du financement du film, ensuite il y a des caisses annexes, tout cela passe par des commissions, il faut monter des dossiers , c'est un travail assez long.

J'ai eu comme co-producteur Arte, pour la deuxième fois après Edmond,. Cette coproduction consiste à donner de l'argent et en retour le film est largement diffusée sur la chaîne et est disponible en ligne sur internet pendant un an

Ensuite, l'office national du film canadien avec lequel j'avais déjà travaillé sur Edmond aussi,. Ils font un apport en industrie, ils apportent toute l'infrastructure et les techniciens nécessaires pour faire le son du film et les versions anglaises, car tout l'intérêt de faire un film au canada c'est qu'il faut deux versions. La version anglaise et française des voix. Ils ont des techniciens sublimes pour faire le son, des infrastructures absolument géniales , moi j'adore particulièrement Montréal où je compte m'installer un jour.

La production de Montréal
 

Sur la rentabilité d'un court métrage, un court-métrage n'est pas rentable. Absolument pas rentable. Il peut rapporter un petit peu de bénéfice par les ventes télé.

Ca peut être rentable pour le réalisateur et l'auteur Il faut savoir qu'y beaucoup de prix de festival qui sont dotés et ça rapporte très vite de l'argent si le film marche, ça c'est vraiment très intéressant.
Autres revenus possibles, les ventes dans les réseaux de cinéma d'art et essai par exemple, mais c'est des sommes assez modestes.

Donc un film de court-métrage c'est un film qui ne rapporte pas d'argent et sans les aides précieuses du CNC ou des conseils régionaux, et des télévisions bien sûr, le court-métrage ne pourrait pas se faire dans les volumes où il se fait en France.
Dans des tas de pays, à commencer par les les états-unis, il n'existe pas des structures comme le CNC, les gens se démerdent autrement, ils font de la pub', ils mettent de l'argent de côté et quand ils ont la somme, ils s'autofinancent. Mais bon tout le monde nous envie le CNC et à juste titre, il devrait y avoir un CNC dans chaque pays.

 

Est ce qu'il serait indiscret de te demander le coût d'un tel film ?

Non non ! Une tête disparaît c'était 120 000 euros en cash plus l'apport en industrie de l'ONF Edmond c'était 180 000 euros. Bizarrement pour une tête disparaît j'ai eu moins de pognon de la part du CNC que pour Edmond qui avait fait un carton .
A rien comprendre ! C'est comme ça...

 

18) Je voulais en revenir à la psychiatrie qui est très présente dans ton univers, quelque chose que je vois comme un thème récurrent Tu as d'ailleurs rapidement évoqué lors d'une interview cet attrait pour la maladie mentale, tu as prononcé le mot HP, un terme plutôt utilisé par les soignants ou bien par les patients (ou famille de patients) J'ai en partie une réponse à ma question par rapport à ta grand-mère, mais je voulais te demander d'où te viens cet attrait du monde psychiatrique ? L'as-tu côtoyé par ta grand-mère ou par d'autres contacts ?

Ouais, depuis très jeune, j'ai été confronté à cet univers...avec des gens proches de moi. C'est un univers que je connais plutôt bien et c'est un univers qui m'intéresse énormément. Parce que c'est un mal assez dissimulé , et encore dans les années 80 , la dépression nerveuse, pour ne parler que de ça, c'était tabou !
Les antidépresseurs c'était pour les fous, donc y a eu beaucoup de chemin parcouru, mais pas encore assez ! C'est une cause pour laquelle il est important de se battre pour éviter des dérives très très dangereuses comme le sont les classements, le DSM où on commence à classifier de manière tout à fait douteuse les maladies mentales …

Moi ce qui m'intéresse c'est de considérer la maladie mentale comme une autre et de ramener cette pathologie vers des soins adaptés, et non plus de stigmatiser les gens qui en sont atteints Donc oui je suis très intéressé par cet univers, pour avoir aussi rencontré des patients qui sont des gens souvent bousculés par la vie, et très intéressants !
Avec une belle humanité même à vif mais une belle humanité !

Donc oui c'est un univers récurrent dans mes films et à mon avis ça ne va pas s'arrêter !

 

D'accord ! :-)

Ca va continuer dans cette direction

 

19) Tu disais lors d'une interview être quelqu'un de terriblement triste Ton art te permet-il de panser/penser certaines plaies et comment fais-tu au quotidien afin de ne pas semer cette tristesse autour de toi et notamment à tes proches ?

Non, alors j'ai du fumer la moquette le jour où j'ai dis ça parce que je suis pas terriblement triste !
Faut pas déconner !
En revanche je suis très mélancolique, ça oui.

J'ai une forme de mélancolie en moi, que d'ailleurs je cultive vu que c'est mon fond de commerce pour mes illustrations et pour mes films, donc ça oui, j'aime bien la mélancolie. C'est un état que j'aime bien .
Socialement ça va, je suis pas vraiment triste, c'est même un peu le contraire, mais c'est vrai que j'ai un côté un peu austère, mais non je ne suis pas terriblement triste.

Et pour remédier à trop de mélancolie, c'est le travail qui m'enchante, j'ai pas de passion annexe, j'ai pas de violon d'ingres, ma passion c'est mon travail. Tout m'intéresse.
Mon travail est assez vaste, c'est l'écriture, la réalisation, le dessin, la sculpture, donc avec tout ça j'ai pas le temps de m'emmerder.
Je m'amuse comme un petit fou.

 

"Etre méchant moi ça m'intéresse pas."

 

20) Tu avais dit: « J'ai envie de faire rire, mais ça ne fait rire que moi » C'est quelque chose qui rejoint ce mal être, une façon de rire autrement, de manière plus désespérée ? Tu disais ne pas être optimiste pour le futur.

Je ne suis pas désespéré ! Je suis pessimiste. C'est pas pareil.
Je suis assez pessimiste sur certaines choses et assez optimiste sur d'autres. C'est assez tempéré Ce qui me fait vraiment rire, c'est l'humour cruel, l'humour grotesque. Des situations, des personnages ….le personnage me fait beaucoup rire !
Les absurdités, j'aime beaucoup l'absurde, je pense comme ça a Raymond Devos qui était un maître de l'absurde, lui ça passait par les mots avec lequel il jonglait de manière magistrale, mais c'est univers totalement absurde, et pas forcément cynique, le cynisme m'emmerde ! Le cynisme et le politiquement incorrect, c'est une parfaite posture pour se comporter comme un beauf !

                                                   Raymond Devos
 

Etre méchant moi ça m'intéresse pas.
Ce qui m'intéresse c'est de se moquer de soi ,de nos absurdités, et si en plus c'est touchant bah voilà ! On atteint des sommets !
Donc c'est vrai, mes films me font rire, ils ne font que moi parce que les situations me font marrer quand je les écris et puis je suis très très déçu quand je suis dans la salle parce que ...parce que personne ne rigole ! Donc je suis entrain de rater ma vocation de comique ! (rires)

 

C'est vrai ? Moi une tête disparaît , y a des moments très drôles

Ah je trouve ! Quand elle l'appelle la bécasse !

 

Et puis elle se cache, y a un jeu avec la fille...

Oui elle est très bourrique !
Ma femme me dit c'est une bonne bourrique ! Elle a raison ! (rires)

 

21) Parlons maintenant de votre façon de travailler en équipe Commençons par les animateurs, comment gères-tu ta relation avec les animateurs ? Pour avoir diriger des comédiens, j'ai l'impression de la façon dont tu en parles que cela soit un peu similaire, cela semble demander évidement de l'exigence mais également beaucoup de tendresse pour ces personnes qui vont exprimer des sentiments et une histoire pour toi, le metteur en scène du projet.

 

La semaine prochaine, suite et fin de cet entretien. 


Franck Dion nous explique sa manière de travailler avec ces différents collaborateurs : Animateurs, producteurs, dont Didier Brunner qui a produit notament Kirikou et les triplettes de Belleville, Pierre Caillet l'homme qui apporte la musique à ses images, de son projet de long métrage mais également de ses goûts artistiques et ludiques....

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Merci à mes Tipeeeurs de me soutenir  : Arnaud Urbon, Bruno Faidutti et Emilie Thomas, Nicolas Soubies  et dorénavant Virgile De Rais 

 

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Yves Hirschfeld
Benoit Forget
Bruno Faidutti 1ère partie
Bruno Faidutti 2ème partie
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François Haffner 1ère partie
François Haffner 2ème partie
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